Le Monde

Dans chacune de ses œuvres, la mangaka Mari Yamazaki prend un immense plaisir à esquisser les comportements humains. Dans Thermae Romae, la série qui l’a fait connaître auprès du public européen, elle profite de l’humour et de la cocasserie de son pitch – un architecte romain qui se retrouve propulsé dans le Japon contemporain et s’en inspire pour construire des bains antiques et s’attirer les faveurs de l’empereur – pour aborder le terme des divergences culturelles. Sa récente série sur le naturaliste Pline lui permet de réfléchir à l’attitude de l’humanité face aux catastrophes naturelles.

« Un simple monde », recueil de nouvelles graphiques. Novembre 2017. / MARI YAMAZAKI

Avec Un simple monde, recueil de nouvelles graphiques édité chez Pika, en France, et prépublié au Japon en 2010, la mangaka se penche sur un registre en apparence plus badin : les relations amoureuses. Comment s’aiment les couples à travers le monde ? Qu’est-ce que cela raconte de leur culture ? De l’Italie qu’elle connaît bien puisqu’elle y vit depuis de nombreuses années, à la Syrie, Mari Yamazaki, invente un instant volé dans la vie de six personnages matures établis aux quatre coins de la planète.

Ce fil conducteur lui permet de mettre en lumière le quotidien de différentes sociétés mais aussi de faire passer au premier plan des personnages souvent relayés dans le décor : il y a ce cordonnier qui a du mal à refaire sa vie après la mort de sa femme ou encore cette grand-mère danoise qui ne veut pas quitter sa maison. « Quand je voyage dans un autre pays ou quand je regarde des documentaires, mon regard est très vite attiré par les silhouettes et la vie des gens âgés qui s’écoule en arrière-plan », explique-t-elle auprès de son éditeur français.

« Un simple monde », recueil de nouvelles graphiques. Novembre 2017. / Mari Yamazaki

Sans caricature mais avec un soin du détail anthropologique, à l’image de celui qu’elle a développé dans ses séries historiques, la dessinatrice propose des histoires banalement poétiques. Pas de grands rebondissements ni de comédie romantique abracadabrante donc. Seul regret : qu’elle n’ait pas croqué un couple de concitoyens, elle qui est probablement l’une des artistes japonaises les plus critiques envers son pays. Grande voyageuse, Mme Yamazaki, 50 ans, a entretenu assez tôt un rapport distancié avec la société japonaise, comme en témoigne cette interview réalisée en 2013 par le magazine Zoom Japon.

« Un simple monde », recueil de nouvelles graphiques. Novembre 2017. / Mari Yamazaki

Un simple monde, de Mari Yamazaki, traduction de Julia Brun, Pika, 160 pages, 15 euros.