Charlie Rose lors de « CBS This Morning » en janvier 2016. / Richard Shotwell / Richard Shotwell/Invision/AP

Charlie Rose, l’un des journalistes de télévision les plus respectés aux Etats-Unis, est pris à son tour dans un scandale de harcèlement sexuel. Dans The Washington Post (WP), huit femmes ont témoigné lundi 20 novembre que l’animateur du « Charlie Rose show », une émission d’interviews haut de gamme, recherchée par les décideurs, les intellectuels et les chefs d’Etat étrangers, avait eu en leur présence un comportement déplacé.

La chaîne publique PBS, qui assure la diffusion du show a immédiatement suspendu la distribution, se déclarant « choquée ». La chaîne CBS, dont Charlie Rose, 75 ans, est le présentateur vedette le matin, dans « CBS This Morning », a également interrompu sa collaboration avec le journaliste. Selon le WP, le comportement de M. Rose faisait l’objet de rumeurs depuis des années.

La voir nager nue dans la piscine

Les huit accusatrices – dont cinq ont demandé à conserver l’anonymat – sont des anciennes assistantes ou stagiaires, employées par la compagnie de production Charlie Rose Inc. Agées de 21 à 37 ans au moment des faits, elles décrivent un comportement devenu familier, cinq semaines après les premières révélations sur le producteur Harvey Weinstein – qui est lui également accusé de viol, exhibitionnisme, mains baladeuses, avances non désirées.

Reah Bravo, une productrice associée qui sortait de l’université et cherchait un emploi, a fait état de gestes déplacés – mains sur les cuisses, pressions du corps – alors qu’elle voyageait avec Charlie Rose en voiture ou dans un avion privé. Kyle Godfrey-Ryan, l’une des assistantes, a raconté que l’animateur avait paradé, nu, devant elle au moins une douzaine de fois alors qu’elle avait été convoquée pour travailler dans l’une de ses deux résidences new yorkaises. Elle affirme avoir reçu des coups de fils nocturnes où le « boss » décrivait son fantasme de la voir nager nue dans la piscine de sa villa de Long Island, pendant qu’il se rincerait l’œil depuis la chambre à coucher…

Interrogée par The Washington Post, Yvette Vega, collaboratrice de longue date du journaliste, a « profondément regretté » de ne pas avoir fait plus pour « aider » les jeunes recrues.

Excuses pour « son comportement déplacé »

Sur son compte Twitter, Charlie Rose a publié une déclaration où il affirme que pendant ses quarante-cinq années de journalisme, il s’est « enorgueilli de défendre la carrière des femmes » avec lesquelles il a travaillé. Parallèlement, il a admis qu’il s’était « parfois comporté de manière dépourvue de sensibilité » et il s’est excusé pour son « comportement déplacé ». Mais, ajoute-t-il, réfutant certains témoignages, « j’ai toujours pensé que je poursuivais des sentiments partagés ».

Elegant, francophile, Charlie Rose produisait depuis 1991 une émission de qualité – toujours sur fond noir – à l’opposé des talk-shows bruyants des chaînes câblées, laissant à ses interlocuteurs tout loisir d’expliquer leurs vues. En 2011, CBS avait fait appel à lui pour relancer son émission matinale. Correspondant de l’émission « 60 minutes » depuis près de dix ans, il avait interviewé le président syrien en 2013. Son « tête à tête avec Assad » avait été récompensé d’un Peabody awards.

Les révélations du Washington Post sont intervenues alors que le correspondant du New York Times à la Maison Blanche Glenn Thrush, 50 ans, a dû, lui, aussi admettre un comportement déplacé. Le quotidien l’a suspendu dans l’attente des conclusions d’une investigation sur les allégations portées lundi par quatre journalistes sur le site Vox. Ancien journaliste vedette de Politico, Glenn Thrush avait été recruté en janvier par le NYT pour suivre l’administration Trump.