La quasi-totalité du bâti de Saint-Martin a été détruit par l’ouragan de catégorie 5Irma, qui a également tué onze personnes sur l’île. / MARTIN BUREAU / AFP

Un accord pour la reconstruction « durable » de Saint-Martin, ravagé par l’ouragan Irma, a été signé, mardi 21 novembre, entre l’Etat et la collectivité. Le texte prévoit notamment de renforcer les services de l’Etat sur place, de mettre en place une politique d’urbanisme « responsable et contrôlée » et d’améliorer la coopération franco-néerlandaise.

Cet accord, signé par le président de la collectivité de Saint-Martin, Daniel Gibbs, et la ministre des outre-mer, Annick Girardin, s’inspire d’un rapport du délégué Philippe Gustin, rendu public mardi lors du quatrième comité interministériel à la reconstruction, à Matignon.

« Cet accord, c’est une feuille de route qui donne à chacune des parties, Etat et collectivité, des missions complémentaires et fidèles à leurs compétences respectives », a salué la ministre des outre-mer.

Deux mois et demi après le passage du cyclone de catégorie 5 qui a endommagé 95 % du bâti et tué onze personnes à Saint-Martin, le rapport de Philippe Gustin préconise notamment de renforcer les services de l’Etat dans l’île pour « assurer un contrôle de légalité et des politiques publiques plus efficaces », notamment sur les questions d’emploi, d’eau, d’environnement et d’urbanisme.

Services sous-dimensionnés

Saint-Martin est devenu collectivité d’outre-mer en 2007, ce qui lui a donné d’importants domaines de compétence. « La collectivité n’était peut-être pas complètement mûre pour le faire », a expliqué M. Gustin à l’Agence France-Presse, rappelant que la collectivité ne dispose toujours pas de plan local d’urbanisme (PLU), pourtant de sa compétence.

De plus, face à une évolution rapide de sa population – qui a plus que quadruplé entre 1982 et 2000 pour atteindre plus de 35 000 habitants en 2016 – « on n’a pas dimensionné les services de l’Etat », basés essentiellement en Guadeloupe pour l’instant, regrette M. Gustin, qui invite à « un renforcement du personnel ».

Point fort du rapport, la « coconstruction d’une politique de l’urbanisme responsable et contrôlée », qui passera par « un diagnostic précis » du territoire, des équipements (réseaux d’eau, de téléphonie, d’électricité notamment), du bâti dégradé, de la situation des personnes sinistrées et la mise en place d’« une nouvelle carte des aléas » dressée par l’Etat.

M. Gustin préconise de fixer une « doctrine pour une reconstruction préventive », qui impliquerait de « réviser les documents d’urbanismes locaux », de « définir les conditions d’éventuelles reconstructions en zones inondables », de réaliser un « guide pratique et pédagogique pour la reconstruction » et de mettre en place « une stratégie conjointe de lutte contre les implantations illégales et une police de l’urbanisme et de la construction ».

« Prendre le temps du diagnostic »

A plus long terme, il suggère d’engager « une réflexion sur le modèle économique » de l’île et le développement d’un « tourisme durable », avec le lancement d’un audit sur la situation économique et sociale de Saint-Martin et une meilleure valorisation de l’offre touristique.

Enfin, M. Gustin revient sur le « nécessaire rééquilibrage » entre les parties française et néerlandaise de Saint-Martin, rappelant que la partie française servait jusque-là « d’amortisseur social » aux populations « qui travaillent du côté néerlandais mais viennent se faire soigner ou toucher le RSA [revenu de solidarité active] côté français ».

Mais tout cela prendra du temps : « C’est la phase la plus délicate, aujourd’hui, il faut accepter le temps du diagnostic, du retour d’expérience », reconnaît M. Gustin. Pour gérer « la phase de transition », il suggère de maintenir sur place des forces de l’ordre « crédibles », après l’image désastreuse renvoyée par les pillages survenus après l’ouragan.