L’hiver approche, les températures dégringolent… et dans certains établissements scolaires, c’est la panique : des élèves se retrouvent dans des salles de classe glaciales, équipés de manteaux, bonnets et gants, faute d’un système de chauffage efficace. Des conditions de travail peu favorables que parents et enseignants déplorent. Y aurait-il un manque d’anticipation de la part des maires, responsables de l’entretien des écoles ? Eux se justifient par l’insuffisance de budget alloué pour rénover les équipements vétustes.

À Grigny, dans l’Essonne, la situation n’a « jamais été aussi grave », indique un membre de l’équipe du groupe scolaire Gérard-Philipe-Elsa-Triolet. Les 500 écoliers et 30 professeurs y ont froid « depuis trois semaines », précise en milieu de semaine cette personne (qui souhaite rester anonyme), avec des températures allant de 9 à 15 degrés dans les salles. « Les élèves frissonnent, ils n’arrivent pas à travailler », s’alarme-t-elle.

D’autres situations de ce type ont été signalées en novembre. À la maternelle Henri-Wallon de Bagnolet, en Seine-Saint-Denis, le thermomètre affichait 10 degrés au début du mois, en raison d’un problème sur le réseau de chauffage urbain. Dans le même département, à Sevran, les élèves de sept écoles ont eux aussi trouvé des salles gelées au retour des vacances de la Toussaint. Pareil dans une école élémentaire du 15e arrondissement de Marseille, où des radiateurs d’appoint ont été installés le 9 novembre dans les 13 classes non chauffées depuis quatre jours.

Vague de pannes

Des fuites au niveau de la canalisation de chauffage sont à l’origine de la situation à Grigny. Lors d’une intervention d’urgence, on a rebouché les trous et des convecteurs ont été fournis. Mais ces derniers « endommagent » selon la mairie le poste électrique extérieur. Lundi 20 novembre, un autre problème est survenu : la canalisation a explosé, entraînant une coupure générale d’électricité.

L’épisode de trop pour les enseignants, qui décident de ne pas assurer la classe ce jour-là et d’occuper les enfants dans la cour pour qu’ils aient moins froid. Le maire de la ville, Philippe Rio (PCF), s’est rendu sur place et la chaudière a été relancée mardi matin, ce qui a permis de gagner quelques degrés.

Ce n’est pas la première fois que ce genre d’événements se produit dans des écoles. L’hiver 2016-2017, une panne de chauffage a eu lieu dans un établissement à Maubeuge. On peut même remonter quinze ans auparavant, en 2002, à l’école primaire Jean-Moulin, dans l’Oise, où des salles de classe frisaient les 10 degrés, tandis que la température intérieure suffisante est fixée par décret à 19 degrés.

« Moduler » les dotations

Chaque fois, des solutions temporaires sont trouvées : colmater les fuites, installer un chauffage d’appoint, mettre les enfants dans une salle municipale… Mais elles ne règlent pas le problème de fond : le manque de financement. Grigny dispose d’un budget annuel de 2 à 3 millions d’euros dédiés aux écoles, alors que ce poste de dépense représente 6 millions d’euros. « 60 % du budget de la ville y va », fait valoir le maire.

Ce dernier dénonce un « effet pervers » : les communes « pauvres » avec une « surcharge scolaire » n’ont « pas la confiance des banques » et n’obtiennent donc pas de prêts pour entretenir leur patrimoine. L’élu local aimerait que soient « modulées » les dotations de fonctionnement en accordant une « prime spéciale » aux villes dont la part d’enfants est « anormalement élevée » quand d’autres ont une population « vieillissante ».

Du côté des parents, l’analyse n’est pas la même. La déléguée de parents d’élèves, Chantal M’Piana, regrette une absence de dialogue entre le maire de Grigny et les familles : « Si le budget pose autant problème, on devrait en être informé ». D’après cette conseillère municipale de l’opposition, les parents ne sont « jamais convoqués » alors qu’avec leur appui, « on pourrait trouver des solutions ».

Le changement de chauffage du groupe scolaire de Grigny est estimé à 100 000 euros. Le maire se dit obligé de dépenser cette somme pour « assurer le chauffage », même s’il préférerait une école neuve. Mais cela a un coût : de 8 à 10 millions d’euros. À ce titre, la ville fait partie du Programme national de rénovation urbaine (PNRU), et espère voir ses bâtiments délabrés reconstruits ou lourdement restaurés. Quatre groupes scolaires des années 70 sont concernés, soit 2 000 enfants.