Benjamin Griveaux et Christophe Castaner le 1er mai à Paris. / Gilles BASSIGNAC

Annoncé depuis plusieurs jours, provoqué par l’élection samedi 18 novembre de Christophe Castaner à la tête de La République en marche, l’Elysée a procédé vendredi 24 novembre à un remaniement – le troisième depuis le début du quinquennat – du gouvernement. Le poste de porte-parole, jusque-là occupé par Christophe Castaner, échoit à son collègue Benjamin Griveaux. Le poste de secrétaire d’Etat auprès du ministre de l’économie, Bruno Le Maire, que M. Griveaux occupé jusqu’ici échoit désormais à Delphine Gény-Stephann.

Ce remaniement, annoncé en début de semaine, a pris plus de temps que prévu, l’exécutif se laissant le temps de vérifier la situation fiscale et patrimoniale des nouveaux entrants, afin d’éviter les mauvaises surprises.

Pour remplacer M. Castaner au poste stratégique de porte-parole, le chef de l’Etat a décidé de faire confiance à Benjamin Griveaux, un autre « marcheur » de la première heure qui retrouve ainsi un peu de lumière, après avoir été mis dans l’ombre depuis l’élection de M. Macron.

Le président a semblé hésiter un temps entre M. Griveaux, qui était opérationnel pour avoir occupé cette fonction de porte-parole pendant la campagne présidentielle, et le fidèle secrétaire d’Etat à la cohésion des territoires, Julien Denormandie, plus discret mais en qui M. Macron a entièrement confiance. « Julien est un homme de dossiers, qui maîtrise à la perfection les sujets complexes et techniques, Benjamin est plus généraliste et plus politique », résume le député LRM Aurélien Taché.

Quant à M. Castaner, il se maintient comme secrétaire d’Etat chargé des relations avec le Parlement. Le député des Alpes-de-Haute-Provence, qui était peu enthousiaste à l’idée de prendre la direction du parti présidentiel, a toujours souhaité garder son poste au gouvernement.

Sa double casquette, chef de parti et responsable des relations avec les autres formations politiques au Parlement, était pourtant critiquée au sein de la majorité. Emmanuel Macron a tranché et choisi de donner raison à son fidèle lieutenant, soutenu également par le premier ministre Edouard Philippe, avec lequel il entretient les meilleures relations.

Brillant mais cassant

Ces dernières semaines, de nombreux acteurs de la macronie doutaient que M. Macron choisisse M. Griveaux, brillant mais cassant, pour remplacer M. Castaner, visage rond et chaleureux d’un gouvernement très technique aux personnalités encore inconnues des Français. M. Griveaux, qui s’est fait des ennemis pendant la campagne, s’est notamment vu reprocher d’avoir affiché trop tôt ses ambitions pour la mairie de Paris en 2020 après sa victoire aux législatives dans la 5e circonscription de la capitale.

Il n’avait d’ailleurs pas été choisi en octobre par M. Macron pour prendre la direction de La République en marche. Sa dernière place du gouvernement dans l’ordre protocolaire avait aussi été analysée par certains piliers de la macronie comme un avertissement lancé par le président à son ambitieux lieutenant, qui doit fêter comme lui ses 40 ans en décembre.

« Quand tu sers Macron, ton agenda doit être celui de Macron, point », mettait ainsi en garde récemment un très proche du chef de l’Etat. « Beaucoup ont laissé entendre que Macron se méfiait de Griveaux, c’est faux. Benjamin est de toutes les réunions stratégiques à l’Elysée, ce qui n’est pas le cas d’autres compagnons de route », rectifie une autre source dans l’entourage du chef de l’Etat.

Venu du Parti socialiste, ancien conseiller de Marisol Touraine au ministère de la santé lors du précédent quinquennat, Benjamin Griveaux a fait ses classes politiques en Saône-et-Loire. Vice-président du conseil départemental, ses relations étaient alors plus que fraîches avec Arnaud Montebourg, l’homme fort du PS local à l’époque.

Fin 2016, ce diplômé de HEC avait quitté un haut poste au sein du groupe immobilier commercial Unibail pour rejoindre Emmanuel Macron dans sa conquête de l’Elysée. C’est par Ismaël Emelien, le stratège de M. Macron, que M. Griveaux a rencontré le futur président. MM. Emelien et Griveaux se sont connus rue de la Planche en 2006, au QG de Dominique Strauss-Kahn, lors de la préparation de la primaire du PS, entouré de politiques confirmés, de petites mains et de jeunes technos, dont ils faisaient partie.

Quelques heures avant l’annonce du remaniement, en marge de la visite d’un centre des Resto du cœur, dans le Xème arrondissement de Paris, le chef de l’Etat avait livré un indice. Serrant la main de M. Griveaux, élu de l’arrondissement, qui l’accompagnait dans sa visite, il lui a glissé un « bravo ».