C’était un projet étudiant un peu fou. En trois ans, une équipe de l’Ecole supérieure des techniques aéronautiques et de construction automobile (Estaca), à Laval, en Mayenne, a imaginé et fabriqué un engin électrique de 7 mètres de long. Objectif : battre un record de vitesse. Nom du projet : « Estaca on the Salt ». Car la course se tient sur lac salé de Bonneville, dans l’Utah, aux Etats-Unis, un lieu mythique que l’on connaît bien de ce côté-ci de l’Atlantique depuis qu’un certain Camille Jenatzy, un Belge, fut le premier à dépasser, en 1899, les 100 km/h avec sa « Jamais contente », une voiture… électrique.

En août dernier, une association étudiante de l’Estaca s’est donc postée sur la ligne de départ de la Speed Week de Bonneville. Leur bolide : Streamy, un engin 100 % électrique de 500 chevaux, aux allures de Batmobile et de Concorde, entièrement imaginé et fabriqué par les jeunes. « L’école a mis à notre disposition un local, où nous avons construit le véhicule, et a complété le budget à hauteur d’environ 15 %. Des professeurs nous ont aidés sur le choix du moteur et des éléments électriques. Tout le reste, nous l’avons fait nous-mêmes, avec nos partenaires », décrit Selina Brun, l’une des 32 participant.e.s du projet.

Sur le lac, lors du premier tour de piste, le suspense était à son comble. « Quand on a entendu qu’on avait passé les 200 km/h, on était super-heureux, se souvient la jeune femme. Le véhicule est monté petit à petit jusqu’à 247 km/h… Et puis il s’est arrêté. » Terrible frustration : les étudiants s’étaient fixé d’atteindre 400 km/h et de battre le record du monde pour un véhicule électrique, actuellement de 345 km/h. Mais les coefficients qu’ils avaient anticipés pour l’aérodynamisme ou l’adhérence du sol salé se sont révélés inadaptés au terrain. Streamy a dû se contenter de 247 km/h.

Record ou pas, le projet a déclenché des réactions en chaîne. « Cela a renforcé notre notoriété et notre positionnement sur les mobilités du futur, se réjouit Jean-Michel Durepaire, directeur délégué de l’école lavalloise. Des partenaires industriels m’ont contacté directement pour avoir les CV des jeunes participants. » A la clé : stage, contrat de professionnalisation ou CDD, notamment dans le domaine de la voiture électrique.

Après cette expérience, l’émulation est à son comble parmi les associations de cette école qui forme des ingénieurs automobiles et aéronautiques sur ses deux campus (Laval et Saclay). La voiture à propulsion électrique est une évolution technologique majeure qui n’a pas échappé à la Fédération internationale de l’automobile (FIA), présidée par un ancien copilote de rallye, Jean Todt : celui-ci a lancé en 2013 la formule E, qui prendra le relais de la F1 à moyen terme. A l’Estaca, un groupe d’étudiants projette justement de construire une voiture de course et d’être la première équipe étudiante à participer à une saison complète de « free racing » (course automobile à bas coût). A suivre !