Le premier ministre canadien Justin Trudeau, à la Chambre des communes d’Ottawa, mardi 28 novembre. / CHRIS WATTIE / REUTERS

« Nous avons eu tort, nous demandons pardon. » Se disant « pétri de honte et de tristesse », le premier ministre canadien Justin Trudeau a présenté à la Chambre des communes d’Ottawa mardi 28 novembre les excuses officielles de son gouvernement à la communauté LGBTQ2 pour « des décennies de discrimination systémique envers les personnes lesbiennes, gaies, bisexuelles, transgenres, queers et bi-spirituelles », terme propre aux bisexuels autochtones.

Même s’il n’est pas le seul parmi les dirigeants du monde à demander pardon pour des erreurs du passé, M. Trudeau en a fait l’un de ses chevaux de bataille préférés. Depuis son élection fin 2015, il a présenté plusieurs fois des excuses solennelles aux autochtones, y compris à la tribune des Nations unies le 21 septembre. Dès son arrivée au pouvoir, il l’avait fait à l’occasion de la publication d’un rapport sur les sévices et disparitions d’enfants envoyés dans des pensionnats indiens jusque dans les années 1950. Il a répété sa demande de pardon le 24 novembre à Terre-Neuve, en rencontrant des survivants de ces pensionnats auxquels il a offert 33 millions d’euros pour régler une poursuite en nom collectif.

En avril 2016, ce sont les Canadiens d’origine sikh à qui M. Trudeau a présenté des excuses pour un événement survenu en 1914 à Vancouver. Un navire transportant 376 passagers avait été renvoyé en Inde à cause des lois discriminatoires en vigueur et malgré le fait que les personnes à bord étaient des sujets britanniques.

Le 6 juillet, le gouvernement fédéral s’est aussi excusé publiquement pour son manque de soutien à Omar Kadhr, un Canadien capturé en Afghanistan et devenu à 15 ans le plus jeune détenu de la prison Guantanamo, et lui a accordé 7 millions d’euros en dommages et intérêts.

« Redresser les torts du passé »

Mardi, M. Trudeau voulait marquer le coup sur une cause qui lui tient à cœur, celle de la non-discrimination en fonction de l’orientation sexuelle ou de l’identité de genre. Lui qui ne rate aucun défilé de la gay pride et qui a fait hisser le drapeau arc-en-ciel pour la première fois au-dessus du Parlement en juin 2016, a évoqué la « honte collective » du Canada qui n’a pas toujours été « un pays avant-gardiste et progressiste ».

Des milliers de fonctionnaires, policiers et militaires ont été renvoyés, brimés, voire poussés au suicide pendant des décennies et jusque dans les années 1990 en raison de leur orientation sexuelle. Cette « purge », a-t-il dit, « restera à jamais un acte de discrimination tragique de la part du gouvernement » mais « il faut reconnaître et redresser les torts du passé ».

Le matin même, il avait déposé un projet de loi visant à radier les condamnations pour homosexualité avant la dépénalisation intervenue en 1969. Deux jours plus tôt, un accord à l’amiable a été conclu par Ottawa pour régler une poursuite en nom collectif rassemblant quelque 3 000 fonctionnaires ou ex-fonctionnaires victimes de discriminations en raison de leur orientation sexuelle. A la clef : 72 millions d’euros de dommages et intérêts.