Emmanuel Macron et le président du Ghana, Nana Akufo Addo, le 30 novembre à Accra. / LUDOVIC MARIN / AFP

Ultime étape de la tournée africaine d’Emmanuel Macron, la courte visite au Ghana de
jeudi 30 novembre a été pensée comme un passage obligé. L’Elysée insiste sur le fait que les vieux schémas coloniaux d’Afrique francophone, anglophone ou lusophone doivent désormais être dépassés, que la francophonie doit être « moins défensive » et constituer « un facteur d’intégration ».

Coincé entre trois pays francophones, présidé par Nana Akufo-Addo, francophile revendiqué, à la différence de certains de ses prédécesseurs, modèle démocratique qui a connu trois transitions pacifiques, loué pour le dynamisme économique de son secteur privé, le Ghana semblait tout désigné pour accueillir la première visite d’un président français depuis son indépendance, il y a soixante ans.

M. Macron a salué en son hôte l’incarnation d’« une nouvelle génération de leaders en Afrique qui croit dans une nouvelle histoire pour l’avenir et la jeunesse. » Accompagné du premier ministre néerlandais, Mark Rutte — une façon de souligner que la diplomatie française entend impliquer davantage les Européens dans les questions africaines —, le chef de l’Etat a notamment estimé anormal que « l’Europe » soit « derrière la Chine » au Ghana.

Pour sa part, Nana Akufo-Addo a rendu hommage à « la détermination d’Emmanuel Macron » à poursuivre l’engagement militaire de la France au Sahel et a tracé les contours de son ambition pour le Ghana : s’émanciper de l’aide occidentale et suivre le modèle de l’Irlande, passée de terre d’émigration à un statut d’île start-up.

Les deux présidents ont plaidé pour que les jeunes Africains restent et réussissent en Afrique, plutôt que de « croire à un eldorado en Europe », pour le Français, ou que de « mendier l’aide » des pays riches, pour le Ghanéen. M. Macron a insisté sur le fait que « l’Europe doit avoir une politique de coopération pour qu’un jeune Africain puisse se dire qu’il va réussir formidablement dans son pays », par exemple y « développer son entreprise ».

La crise togolaise

Au-delà des hommages de circonstance et des promesses de renforcement des relations bilatérales, cette visite a aussi été l’occasion d’aborder la crise politique qui secoue le Togo, voisin oriental du Ghana. Depuis août, des manifestations s’y succèdent pour réclamer le départ du président Faure Gnassingbé, dont la famille dirige depuis un demi-siècle le pays.

Alors que le président en exercice de l’Union africaine, le guinéen Alpha Condé, recevait ces jours derniers à Paris les dirigeants de l’opposition togolaise, M. Macron avait déclaré la veille, sur RFI et France 24, souhaiter que « le peuple puisse s’exprimer librement. (…) Dans ce pays, comme dans quelques autres, il faut un cadre électoral dans lequel les oppositions puissent aller à un processus électoral contrôlé qui peut aboutir à une confirmation démocratique ou à l’alternance. La conservation longue du pouvoir, sans processus électoral et sans cadre pluraliste, n’est pas une bonne chose. »

Nana Akufo-Addo, qui tente de jouer les médiateurs dans cette crise, n’a pas fait savoir quelle était sa position, ni quelles sont ses solutions pour sortir de l’impasse politique entre une opposition qui exige le départ du président togolais du pouvoir et un chef de l’Etat qui souhaite modifier la Constitution afin de briguer un nouveau mandat en 2020.

De bonne source, le président ghanéen souhaite « engager un dialogue politique en mettant tous les sujets difficiles relatifs au processus électoral sur la table. » En revanche, ce dernier ne serait pas prêt à défendre une position « maximaliste » et à demander à Faure Gnassingbé de se retirer de la présidence.