L’Etat dispose-t-il des bons moyens pour agir en Seine-Saint-Denis, l’un des départements où le taux de pauvreté est le plus élevé, traversé par de multiples problématiques sociales ? Un groupe de député va plancher sur cette question jusqu’à l’été prochain, dans le cadre d’une mission d’évaluation et de contrôle menée à l’Assemblée nationale. Ce travail se focalisera sur trois axes principaux : l’éducation nationale, la politique de sécurité et la justice. Dans chacun de ces domaines, elle analysera les moyens réellement mis à disposition et leur pertinence au regard des problématiques du territoire. Ce travail a la particularité d’être transpartisan. Il est porté par deux co-rapporteurs, l’un issu des Républicains, François Cornut-Gentille, élu de Haute-Marne à l’initiative de cette mission, et l’autre de la majorité, Rodrigue Kokouendo, député La République en marche de Seine-et-Marne. A leurs côtés, des élus du département qui sera radiographié, comme le communiste Stéphane Peu, présent pour la présentation de ces travaux, jeudi 30 novembre, à l’Assemblée nationale.

« La poussière sous le tapis »

« Nous avons déjà auditionné une trentaine de personnes », fait savoir M. Kokouendo. Ces entretiens avec des représentants de l’Etat ou des associations ont permis d’établir un premier constat : la statistique publique est défaillante. « Selon l’Insee, la population est de 1,6 million de personnes dans le département », relate ainsi M. Cornut-Gentille. « Mais les différents acteurs nous disent qu’il y a entre 100 000 et 300 000 personnes en plus sur le territoire », précise-t-il. « Or, pour savoir si les moyens de l’Etat sont proportionnels aux besoins du territoire, il faut savoir quelle est la population ! » Autre domaine dans lequel la statistique s’avère défaillante : la police. « On ne sait pas quels sont les effectifs de la police en service », a regretté, jeudi, Stéphane Peu.

Selon l’ancien adjoint au maire de la ville de Saint-Denis, le manque de transparence sur la situation du territoire est aussi entretenu par les services de l’Etat, parfois pour des questions d’image. « Au sein de l’Education nationale, on m’a déjà dit que parler de certains problèmes risquait d’empirer l’image du département et de créer toujours plus de problèmes pour recruter des enseignants », raconte-t-il. « Il faut arrêter de mettre la poussière sous le tapis ! » prévient l’élu qui ajoute : « On veut user des pouvoirs des parlementaires pour obtenir ces chiffres. »

L’ambition de ce groupe de travail est de fournir des « recommandations pour améliorer les outils dont l’Etat dispose pour agir » a précisé Rodrigue Kokouendo. « Il ne s’agit pas de décerner un bon ou un mauvais point à tel ou tel gouvernement », prévient François Cornut-Gentille. « Des chiffres clairs, cela permet un débat politique éclairé. Aujourd’hui, les conditions ne sont pas réunies pour que ce débat se tienne », ajoute-t-il.