Au Congrès américain, le 1er décembre. / J. Scott Applewhite / AP

Les sénateurs républicains se sont dépensés sans compter pour obtenir, vendredi 1er décembre, le premier succès législatif de la nouvelle administration, mais pour quel bénéfice ? Lorsque la Chambre des représentants a adopté sa propre réforme fiscale, en octobre, les élus démocrates ont raillé leurs homologues républicains en les gratifiant d’« au revoir » moqueurs.

Le calcul de l’opposition est simple : cette réforme pourrait devenir un boulet pour le Grand Old Party à l’occasion des élections de mi-mandat, en novembre 2017, qui sont traditionnellement défavorables au parti au pouvoir. Le Parti démocrate espère que cette réforme jouera le même rôle destructeur que la réforme de la santé imposée par Barack Obama en 2010. Les élections intermédiaires avaient entraîné la perte de contrôle de la Chambre des représentants, ce qui avait contribué à une impasse législative de six ans.

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La baisse des impôts fait partie de l’identité politique du Parti républicain. Pendant la campagne, la candidate démocrate, Hillary Clinton, avait également milité pour une simplification d’un code particulièrement touffu, mais sans partager les priorités républicaines. Contrairement à la dernière grande réforme en date, qui remonte à 1986, le texte qui devrait être finalement adopté après un rapprochement avec le texte de la Chambre des représentants, ne sera soutenu que par le parti au pouvoir. À l’époque, le président républicain, Ronald Reagan, avait dû composer avec un Congrès dominé par les démocrates.

En décidant de ne pas chercher un terrain d’entente avec les démocrates, le Parti républicain a eu la liberté d’imposer ses priorités : baisse drastique de l’impôt sur les sociétés, taux modéré pour les capitaux rapatriés, allégement considérable de la pression fiscale pour les revenus les plus élevés. Mais ces choix expliquent en bonne partie l’accueil négatif réservé pour l’instant par l’opinion américaine à cette réforme.

Une réforme impopulaire

Lorsque le Congrès a commencé ses travaux en octobre, selon le baromètre Reuters-Ipsos, les personnes interrogées avaient majoritairement un avis négatif (39 % contre 22 % qui jugeaient cette réforme positive), avec plus d’un tiers (38 %) qui assurait ne pas savoir, un résultat élevé explicable par la complexité qui accompagne en général ces sujets.

Un mois plus tard, l’administration Trump a clairement perdu la bataille de l’opinion avec 49 % d’avis négatifs contre 29 % d’avis favorables selon le même baromètre. Une majorité relative de personnes interrogées en novembre par la Quinnipiac University estime que ses impôts ne baisseront pas (36 %) ou qu’ils augmenteront (35 %) alors que seule une petite minorité (16 %) s’attend à en bénéficier. Une majorité absolue (52 %) n’espère aucun impact positif pour la croissance, l’argument avancé en priorité par le Parti républicain. Enfin, 61 % jugent que le projet profitera aux « riches », contre 24 % à « la classe moyenne », et seulement 6 % aux « pauvres ».

Encore plus inquiétant pour le parti au pouvoir, il peut certes compter sur l’adhésion d’une majorité absolue de la part des électeurs qui se définissent comme républicains, mais cette majorité (59 %) reste néanmoins relative selon Reuters-Ipsos pour un sujet traditionnellement fédérateur au sein du Grand Old Party.