Le président du conseil exécutif de Corse, Gilles Simeoni, lors d’un meeting à Bastia, le 30 novembre. / PASCAL POCHARD-CASABIANCA / AFP

Tout au long d’une campagne électorale unanimement jugée sans grande saveur, les débats se sont concentrés autour des accusations de dérive indépendantiste lancées par ses opposants à la liste Pè a Corsica (« Pour la Corse »), principale formation nationaliste en lice, menée par le président du conseil exécutif, Gilles Simeoni, et favorite du scrutin territorial. Une revendication que les candidats, autonomistes comme indépendantistes, se sont évertués à balayer, parfois non sans humour. « Si les Corses nous confirment le 10 décembre, le 11 c’est l’indépendance !, a ainsi ironisé M. Simeoni lors d’un meeting à Ajaccio, le 27 novembre. Et Jean-Guy Talamoni remontera le cours Grandval [siège de la collectivité territoriale de la Corse] sur un char pour attaquer la préfecture ! »

Même l’avènement de la collectivité unique le 1er janvier 2018, avec la fusion, dans une « super-région », de la collectivité territoriale de la Corse et des deux départements, n’aura pas suffi à donner du lustre à une campagne essentiellement animée par les procès d’intention. Ainsi, aux accusations de tentation indépendantiste, les nationalistes ont répondu en critiquant vigoureusement une éventuelle alliance de deux listes de droite et d’une formation La République en marche menée Jean-Charles Orsucci, le jeune maire de Bonifacio, au second tour.

Les sujets de société n’auront été qu’effleurés, comme en témoignent les programmes des sept listes en présence, rien de moins qu’étiques. Seul le Padduc (Plan d’aménagement et de développement durable de la Corse) a suscité quelques passes d’armes. Ce volumineux document, adopté en 2015 et dont la rédaction a été aussi attendue que sa version finale est critiquée, constitue la bible de l’aménagement de l’île pour les années futures – un sujet éminemment sensible dans une région aux mille kilomètres de rivages et aux milliers d’hectares d’espaces naturels encore vierges.

Une participation en question

Candidate soutenue par Les Républicains, Valérie Bozzi – par ailleurs maire de la commune de Grosseto-Prugna, citée comme exemple d’urbanisation incontrôlée – a annoncé son souhait de réviser le document, pourtant adopté après des années d’atermoiements. « On se rend compte que peu de terrains restent constructibles et, forcément, cela entraîne une flambée des prix, a-t-elle déclaré. Nous allons donc à l’encontre même du vœu du document, qui est de permettre à tous les Corses d’accéder à la propriété. »

La principale interrogation concerne le taux de participation. Faible, il renforcerait les nationalistes, dont l’électorat militant manque rarement un rendez-vous électoral. Elevé, il rebattrait les cartes d’un scrutin donné pour acquis à ces derniers, confortés par leur position de sortants. Reste à connaître l’attitude qu’adopteront les listes menées par Mme Bozzi, Jean-Charles Orsucci et Jean-Martin Mondoloni (droite « régionaliste ») au soir du premier tour. D’ores et déjà, selon plusieurs sources, d’étroits contacts ont été pris pour envisager une union. Les scores enregistrés dimanche détermineraient alors la future tête de liste d’une alliance dénoncée par les nationalistes comme « le mariage de la carpe et du lapin ».