Université de Cergy (novembre 2017). / Camille Stromboni - Le Monde

A quoi vont ressembler les compétences – ou « attendus » pour reprendre la terminologie du ministère de l’enseignement supérieur – qui vont être examinées chez les futurs étudiants avant leur entrée à l’université, censées améliorer les résultats en licence ? Le sujet est particulièrement sensible pour les quelque 700 000 lycéens de terminale qui attendent de connaître le détail des nouvelles règles du jeu à l’entrée à l’université.

Selon un document compilant l’ensemble des desiderata des conférences de doyens des différents domaines disciplinaires, que Le Monde s’est procuré et qui a été transmis au ministère de l’enseignement supérieur, les déclinaisons de prérequis envisagées dans les quelque 45 mentions de licence apparaissent très diverses.

Assortiment de compétences scientifiques, d’expression écrite, sportives et touchant à l’investissement associatif en Sciences et techniques des activités physiques et sportives (STAPS) ; aptitude à l’expression orale et écrite, à l’analyse de texte, à la logique, ou encore intérêt pour les questions historiques, sociétales et politiques en licence de droit ; bon niveau d’expression en langue française, dans une langue étrangère, dans une discipline scientifique, intérêt pour les sciences du vivant et la démarche scientifique, motivation et autonomie, en psychologie… La ministre de l’enseignement supérieur, Frédérique Vidal, va devoir trancher bien vite ce cadrage national par mention de licence : elle s’est engagée à communiquer les attendus aux lycéens avant les vacances de Noël. Des annonces sont attendues dans les tout prochains jours.

Cependant, ces critères en cours de définition sont loin de faire l’unanimité dans la communauté universitaire. « Plus on avance, plus on voit qu’on se dirige vers une usine à gaz, avec des attendus anarchiques, une inflation de compétences demandées qu’on ne sait absolument pas comment on pourra évaluer, alors qu’elles ne le sont pas au lycée », s’indigne Hervé Christofol, secrétaire général du SNESUP-FSU (syndical national de l’enseignement supérieur). A l’UNEF, syndicat étudiant qui dénonce la « sélection » instaurée à l’université avec cette réforme, on craint que chaque établissement puisse faire véritablement ce qu’il veut avec des attendus aussi « flous ».

Moins alarmiste, le SGEN-CFDT ne manque pas de relever la nécessité d’harmoniser et de trier, en écartant certains attendus farfelus. « Demander aux lycéens une maîtrise de l’expression écrite n’est pas acceptable, sauf à considérer que les bacheliers sont analphabètes », relève son secrétaire général adjoint, Franck Loureiro.

Cet examen des dossiers des candidats provoque surtout des sueurs froides chez les universitaires. En effet, ce sont entre 2 et 2,5 millions de vœux auxquels les universités devront apporter une réponse, d’après l’hypothèse des documents annexes au projet de loi. « Nous n’allons pas pouvoir examiner un à un tous les dossiers, affirme d’emblée François Germinet, à la tête de la commission formation de la conférence des présidents d’université (CPU). Nous utiliserons les différents outils de la future plate-forme d’admission pour effectuer un premier tri entre ceux qui, sans difficulté, remplissent les attendus et ceux qui, à l’inverse, en sont loin et ont besoin qu’on leur propose un accompagnement, pour pouvoir se concentrer sur les dossiers des candidats tangents. »