Vue du Dôme du Rocher et du Mur des Lamentations à Jérusalem. | Baz Ratner / REUTERS

Le président Donald Trump doit se prononcer cette semaine sur l’épineux statut de Jérusalem, mais plus l’heure de la décision approche plus la pression internationale s’intensifie pour qu’il évite tout choix susceptible de ruiner les espoirs de relance du processus de paix.

Après les Palestiniens puis leurs alliés, la France a émis lundi soir son propre avertissement au président américain. Dans un entretien téléphonique, le chef de l’Etat français Emmanuel Macron a « exprimé sa préoccupation sur la possibilité que les Etats-Unis reconnaissent unilatéralement Jérusalem comme capitale d’Israël », a rapporté l’Elysée.

La question est pourtant la même tous les six mois depuis plus de deux décennies : le président américain accepte-t-il de déménager l’ambassade des Etats-Unis en Israël vers Jérusalem, comme le prévoit une loi adoptée en 1995 par le Congrès, ou signe-t-il une dérogation pour la maintenir à Tel-Aviv, à l’instar du reste de la communauté internationale?

La nouvelle date-butoir pour renouveler la dérogation tombait théoriquement lundi. Jusqu’ici, les présidents successifs ont choisi la seconde solution.

Décision dans les prochains jours

Malgré sa promesse de campagne en faveur d’un déménagement, M. Trump a fini lors de la précédente échéance en juin par se résoudre à attendre, pour « donner sa chance » à la paix entre Israéliens et Palestiniens. « Le président a été clair sur cette affaire depuis le départ: ce n’est pas une question de si, c’est une question de quand », a affirmé lundi soir Hogan Gidley, un porte-parole de la Maison Blanche, en annonçant que la décision de Donald Trump était reportée. « Aucune action ne sera prise sur la dérogation aujourd’hui et nous annoncerons une décision dans les prochains jours », a-t-il ajouté.

Mais selon plusieurs observateurs, le milliardaire républicain est tenté par une troisième voie qui pourrait consister à repousser encore un tel déménagement tout en reconnaissant plus ou moins officiellement Jérusalem comme capitale d’Israël. Il pourrait annoncer son choix mardi ou mercredi, selon des médias et des responsables américains.

Même cette solution de compromis serait un casus belli, ont prévenu ces derniers jours les dirigeants palestiniens, qui estiment que Jérusalem-Est, annexée par Israël en 1967, doit être la capitale de l’Etat auquel ils aspirent et que le statut de la ville ne peut être réglé que dans le cadre d’un accord de paix avec les Israéliens.

Menace d’une « nouvelle intifada » 

Les Palestiniens étaient déjà échaudés par l’imbroglio de leur mission diplomatique à Washington, que les Etats-Unis ont récemment envisagé de fermer pour des raisons relativement obscures avant d’engager un revirement. Pour leur président Mahmoud Abbas, qui tente de mobiliser la communauté internationale, reconnaître Jérusalem comme capitale d’Israël « détruirait le processus de paix » que Donald Trump se dit pourtant déterminé à relancer et même à faire aboutir.

Les islamistes du Hamas ont menacé d’une « nouvelle Intifada » tandis que pour le ministre israélien de la Défense Avigdor Lieberman, « on a là une occasion historique de réparer une injustice ».A l’approche de la décision, d’autres pays et organisations sont montés au créneau. La Turquie a estimé lundi que cela provoquerait « une grande catastrophe » et « mettrait fin au processus de paix », ouvrant la voie « à de nouveaux affrontements ». La Jordanie, gardienne des lieux saints musulmans de Jérusalem, a aussi mis en garde contre « une démarche aux conséquences graves » et les risques d’« escalade ».

Des avertissements relayés par l’Organisation de la coopération islamique (OCI), qui réunira un sommet de ses 57 pays membres si M. Trump reconnaît Jérusalem comme capitale, et par le chef de la Ligue arabe Ahmed Abul Gheit.

Trump face à un dilemme

Le chef de la diplomatie américaine Rex Tillerson s’est entretenu ce week-end avec ses homologues égyptien et jordanien. Emmanuel Macron a insisté pour que le futur statut de la ville soit le fruit d’un accord israélo-palestinien consacrant « deux Etats », « avec Jérusalem pour capitale », une solution jamais reprise à son compte jusqu’ici par l’administration républicaine.

C’est donc un dilemme pour le président des Etats-Unis, qui peine à tenir les promesses du candidat Trump : s’il respecte celle-ci, il risque de faire capoter les efforts de son conseiller Jared Kushner, auquel il a confié la tâche de réconcilier Israéliens et Palestiniens. Une paix indispensable, aux yeux du gendre du milliardaire, pour ramener la stabilité dans la région et souder Israéliens et pays arabes contre un ennemi commun, l’Iran.