Emmanuel Macron, aux côtés du cheikh Tamim ben Hamad Al-Thani, le 7 décembre à Doha. / AMMAR ABD RABBO / AFP

Pour sa première visite officielle au Qatar, jeudi 7 décembre, Emmanuel Macron a soufflé le chaud et le froid sur l’émirat gazier, dont les relations avec la France font l’objet de polémiques récurrentes. S’il s’est dit « très heureux » d’être à Doha pour quelques heures et a loué « l’intensité » de ses échanges avec le cheikh Tamim ben Hamad Al-Thani, le chef de l’Etat a aussi réfuté toute « complaisance » vis-à-vis du pays et lui a demandé « un engagement très clair » dans la lutte contre le terrorisme et son financement.

Alors que le Qatar est accusé, notamment par son grand voisin saoudien, de soutenir des groupes extrémistes, Emmanuel Macron a indiqué, lors d’une conférence de presse commune tenue au palais tout en marbre blanc de l’émir, qu’il serait « très dur avec qui que ce soit qui finance le terrorisme, car nous avons payé un lourd tribut ».

« Je n’accuse personne, mais je veux une méthode professionnelle et simple. Nous faisons pays par pays des listes de structures que nous pensons liées au terrorisme, nous les partageons avec nos partenaires, demandons des engagements très clairs de non-financement et nous nous donnons les moyens de vérifier ensemble », a-t-il ajouté.

Désireux de ne pas en rester « aux grandes déclarations diplomatiques (...) parce que les organisations terroristes ne font pas de grandes déclarations », Emmanuel Macron a présidé avec son homologue la réunion de lancement d’un « dialogue bilatéral à haut niveau » consacré à la lutte contre le terrorisme, son financement et la radicalisation. Une délégation de membres des services de renseignement français, emmenée par Pierre de Bousquet de Florian, le coordinateur du renseignement, était notamment présente.

Réunion bilatérale

« Il y a une clarté complète, nous nous sommes dit les choses, nous avons décidé d’avancer sur un protocole extrêmement précis, sur des actions déterminées ensemble », s’est réjoui M. Macron, qui a dit vouloir s’attaquer aux sources de financement du terrorisme que sont « le trafic d’armes, le trafic de drogue et le trafic d’êtres humains dans la bande sahélo-saharienne ». Les deux pays se sont engagés à tenir une réunion bilatérale sur le sujet au moins une fois par semestre. Le chef de l’Etat a également annoncé que la conférence internationale sur le financement du terrorisme qu’il appelle de ses voeux aurait lieu en avril 2018 à Paris.

Pour autant, Emmanuel Macron a semblé baisser d’un ton dans ses critiques vis-à-vis de l’émirat. Alors qu’il avait dénoncé durant sa campagne la « complaisance » de ses prédécesseurs à l’égard de Doha et celle de « Nicolas Sarkozy en particulier », le chef de l’Etat n’a pas hésité à mettre en scène sa relation personnelle avec le cheikh Tamim. M. Macron s’est ainsi félicité que l’émir ait décidé d’inscrire ses enfants au lycée français Voltaire de Doha. « Cela signifie quelque chose pour la France », a-t-il souligné.

Le chef de l’Etat a également renouvelé son souhait de voir se régler rapidement la crise qui oppose le Qatar à ses voisins du Golfe depuis le mois de juin. « J’ai redit à l’émir le soutien de la France aux efforts de médiation du Koweït et mon souhait d’une solution rapide » au blocus économique et diplomatique imposé à l’émirat par l’Arabie saoudite et ses alliés, a dit M. Macron. Le royaume wahhabite accuse Doha de soutenir des groupes extrémistes et d’être trop proche de l’Iran chiite.

Enfin, le président français, qui était accompagné de plusieurs chefs d’entreprise, s’est ouvertement réjoui d’avoir signé lors de sa visite des contrats pour un montant d’environ de « 12 milliards d’euros », renouant avec une pratique pourtant critiquée de ses prédecesseurs. Une commande de 12 avions de combat Rafale et de 490 véhicules blindés VBCI a notamment été annoncée.

Mais pas question de laisser dire que M. Macron fait comme MM. Sarkozy ou Hollande. Les contrats signés « ne sont pas des contrats affairistes », s’est défendu le chef de l’Etat, ajoutant qu’il s’agit de « contrats d’entreprises à Etat qui correspondent à des besoins » et qui ont été obtenus grâce « à la grande qualité des entreprises françaises ».