Après 875 jours de prison, un sourire est soudainement apparu sur les visages des avocats, proches et collègues d’Ahmed Abba. Jeudi 21 décembre, le correspondant en langue haoussa de Radio France internationale (RFI) au Cameroun a été condamné en appel à deux ans de prison par le tribunal militaire de Yaoundé. « Il a été condamné à vingt-quatre mois, c’est-à-dire en deçà du temps qu’il a passé en prison [vingt-neuf mois], s’est aussitôt réjoui Me Charles Tchoungang, l’un des conseils d’Ahmed Abba. Donc techniquement, il peut être dehors aujourd’hui, demain, après-demain. »

Le journaliste, arrêté alors qu’il couvrait la crise liée aux attaques de Boko Haram dans la région de l’Extrême-Nord, a été jugé coupable de « non-dénonciation d’actes terroristes » mais relaxé de l’accusation de « blanchiment de produits du terrorisme ». Cependant, pour ses défenseurs, la justice camerounaise « n’a jamais eu la moindre preuve de sa culpabilité ». « L’arrêt de la Cour d’appel est une victoire de droit. Ahmed Abba ne faisait que son travail de journaliste et rien d’autre », a insisté Me Tchoungang.

Introuvable pendant trois mois

« Ahmed Abba n’a rien à voir avec Boko Haram. La complicité avait déjà été écartée, le blanchiment a été écarté, l’apologie a été écartée. Nous tombons donc sur une condamnation pour non-dénonciation mais nous ne savons pas exactement de quoi », a ajouté Yves Rocle, chef du service Afrique de RFI, présent à Yaoundé comme à chaque audience.

Dans un communiqué, la direction de RFI s’est dite « soulagée à la perspective de cette libération imminente permise par la justice camerounaise », tout en remerciant « les associations de soutien et les nombreuses représentations diplomatiques, française et étrangères, d’avoir toujours été présentes aux côtés de son correspondant pendant cette épreuve ».

Arrêté le 30 juillet 2015 à Maroua, la capitale de l’Extrême-Nord, Ahmed Abba était demeuré introuvable pendant trois mois. Des semaines durant lesquelles le journaliste a confié avoir été torturé. Le 24 avril, le correspondant de RFI avait été condamné en première instance à dix ans de prison et à une amende d’environ 85 000 euros par la justice militaire. Ahmed Abba a toujours plaidé non coupable. « Je ne me suis jamais associé aux terroristes pour nuire à mon pays et je ne le ferai jamais », avait-il juré lors de la troisième audience de son procès en appel, le 16 novembre.