Place de la Concorde, à Paris, le 28 novembre 2017. / CHRISTIAN HARTMANN / REUTERS

L’installation de la grande roue place de la Concorde et du marché de Noël sur l’avenue des Champs-Elysées ont été marqués par « des irrégularités importantes » dans la passation et le suivi des marchés, indique la Chambre régionale des comptes (CRC) d’Ile-de-France, dans un rapport dont l’AFP s’est fait l’écho, jeudi 21 décembre, et que Le Monde s’est procuré.

Entre 2011 et 2014, la procédure de marchés publics décidée par la mairie a permis à Marcel Campion, propriétaire de la grande roue, d’être le seul à pouvoir remporter le marché pour l’attribution de cette manifestation.

« En 2015, alors qu’un autre concurrent s’était manifesté, la Ville de Paris a, sans motif solide, déclaré la procédure sans suite. Elle a ensuite conclu une convention de gré à gré d’un an avec la société de M. Campion pour une redevance d’un montant inférieur de 400 000 euros à celui proposé par le concurrent », indique le rapport.

Idem pour le marché de Noël organisé sur les Champs-Elysées par le même exploitant. Selon le rapport, les règles fixées par la Ville « entre 2010 et 2016 (…) ont laissé peu de chances sérieuses à d’éventuels concurrents de présenter des offres alternatives ».

Modicité de la redevance

En outre, selon la CRC, la Ville a fait grâce à M. Campion des « cautions » et des « pénalités » qu’elle aurait dû lui réclamer. En 2010, « la Ville a supporté seule des travaux » dans le sous-sol de plus de 300 000 euros pour que l’attraction puisse continuer de se dresser place de la Concorde. La collectivité a aussi assumé des « dépenses » qui auraient dû incomber à l’exploitant du marché de Noël.

Les magistrats s’interrogent également sur la modicité de la redevance exigée par la Ville de Paris pour le marché de Noël. Sachant que celle-ci connaît de « façon très imparfaite » les recettes tirées de la manifestation.

Dans sa réponse à la CRC, la Mairie de Paris qualifie le rapport « de charge portée contre elle ». Elle récuse « les prétendues anomalies » qui lui sont reprochées, affirmant n’avoir commis « aucune erreur de droit », en 2016, en rejetant des offres concurrentes de celle de M. Campion.

Mise en examen pour « favoritisme »

S’agissant de l’attribution du marché de Noël pour 2015 et 2016, la Ville rappelle qu’elle s’est astreinte à une mise en concurrence qui n’était pas légalement obligatoire. Les deux offres concurrentes de celle de M. Campion ont été rejetées, explique-t-elle, parce qu’elles ne correspondaient pas « aux besoins de la ville » qui exigeaient que les exploitants proposent des « animations » aux Parisiens, en plus de l’installation des chalets.

Le rapport de la CRC sera débattu au Conseil de Paris du 3 février 2018. Les élus parisiens d’opposition de la droite et du centre dénoncent « la légèreté », « la désinvolture » de la mairie, voire les « graves dysfonctionnements » dans la passation des marchés avec M. Campion.

Le 10 novembre, la Ville de Paris avait été mise en examen pour « favoritisme » par le juge financier Renaud Van Ruymbeke dans le cadre d’une enquête sur les conditions d’attribution de l’emplacement de la grande roue de la Concorde à la société de Marcel Campion, en 2015. « L’information judiciaire en cours (…) démontrera l’absence complète de favoritisme par la collectivité », avait alors réagi le service de presse de la Ville de Paris. Dans cette affaire, le « roi des forains » a été, lui, mis en examen en mai.

En cette fin d’année, le marché de Noël n’a pas été autorisé par la Mairie de Paris. Vendredi 22 décembre, le Conseil d’Etat a rejeté le recours de M. Campion contre la décision du tribunal administratif de Paris, qui actait la suppression de cette manifestation.

La grande roue sera, elle, démontée à partir de juillet 2018 à la suite d’un vote des élus parisiens. Au grand dam de M. Campion.