Le cours du bitcoin a plongé à 13 000 dollars, vendredi 22 décembre. / Dado Ruvic / REUTERS

Mais qu’arrive-t-il au bitcoin ? Star des marchés début décembre, la cryptomonnaie voit son cours s’effondrer depuis plusieurs heures. Alors qu’il semblait en passe d’atteindre les 20 000 dollars pour un bitcoin lundi 18 décembre, il a en effet plongé à 13 000 dollars vendredi 22 décembre. Une violente chute, rappelant à quel point le cours de l’e-devise créée en 2009 est aussi volatil qu’instable : début 2017, il ne dépassait pas les 1 000 dollars.

A première vue, ce retournement peut paraître déroutant, tant depuis quelques semaines, le bitcoin suscite l’enthousiasme (et les appétits) d’une partie de la planète finance. Lundi 18 décembre, le Chicago Mercantile Exchange (CME) a ainsi lancé des contrats à terme sur la cryptomonnaie, une semaine après le Chicago Board Options Exchange (CBOE), l’autre grande Bourse de Chicago. Une forme de reconnaissance et d’institutionnalisation pour le bitcoin, dont l’émission et les échanges échappent au contrôle des Etats et des banques centrales.

De fait, nombre de fonds d’investissement, en quête de rendement, ont bénéficié de ces nouveaux instruments financiers pour parier sur la hausse (ou la baisse) du cours. Encore inconnu du grand public il y a deux ou trois ans, le bitcoin a également attiré beaucoup de particuliers ces derniers mois, espérant eux aussi profiter de l’envolée.

Les régulateurs, eux, n’ont pas tardé à tirer la sonnette d’alarme, rappelant que cet emballement spéculatif était susceptible de se dégonfler comme un ballon de baudruche, au risque de ruiner les particuliers ayant tenté l’aventure. En outre, soulignent-ils, la monnaie virtuelle n’a pas de cours légal. Ce qui signifie, concrètement, qu’aucune assurance ou protection juridique ne permettent d’être indemnisé en cas de vol. Leurs avertissements ont-ils été entendus ? Peut-être.

Piratage d’une plate-forme sud-coréenne

Pour comprendre la chute de l’e-devise, il faut d’abord rappeler que les volumes d’échange sont faibles. « De plus, la détention de bitcoins est très concentrée : 1 000 personnes détiennent 40 % du stock, rappelle Eric Dor, économiste à l’école de management IESEG. Il suffit d’une qu’une poignée d’entre elles vendent des bitcoins pour en déstabiliser le cours. »

Ces derniers jours, d’autres facteurs ont contribué à la chute. Certains ont revendu leur bitcoin avant Noël, afin de toucher les bénéfices. D’autres ont été refroidis par la faillite de la plate-forme sud-coréenne d’échange en cryptomonnaie Youbit : mardi 19 décembre, elle a été contrainte de mettre la clé sous la porte à la suite d’un piratage. 17 % de ses actifs ont été dérobés. Un brutal rappel à la réalité : si les transactions en bitcoin, protégées par la cryptographie, ne peuvent pas être falsifiées, les portefeuilles numériques où sont stockés les bitcoin peuvent en revanche être dérobés.

Mais ce n’est pas tout. Le gendarme financier américain (la SEC, Securities and Exchange Commission), a suspendu mardi la cotation de Crypto, une plate-forme d’échange de cryptomonnaies, soupçonnée de manipulation des cours. Une douche froide pour nombre d’investisseurs et de particuliers.

Le nombre d’utilisateurs sature les capacités du réseau

Certains ont également pris conscience des divisions existant au sein de la communauté bitcoin. L’émission de celui-ci est contrôlée par un algorithme informatique, qui fonctionne grâce à une communauté d’utilisateurs mettant leurs ordinateurs en réseau pour contrôler toutes les transactions en bitcoins. Celle-ci sont répertoriées dans une immense base de données publique appelée « blockchain ».

De plus, l’algorithme limite à 21 millions le nombre total de bitcoin qui seront émis (il y a déjà 16,7 millions en circulation).

Problème : l’explosion du nombre d’utilisateurs sature les capacités du réseau, ralentit les échanges et provoque une hausse des frais de transaction. Pour contourner ces défauts, ainsi qu’un certain nombre d’autres limitations, une partie de la communauté a, en août, créé le « bitcoin cash », qui reprend les mêmes principes que le bitcoin, ainsi que l’historique de ses transactions, mais avec plus de possibilités. Ses défenseurs assurent qu’il s’agit du « vrai bitcoin », et qu’il supplantera bientôt son grand frère.

Le 19 décembre, Coinbase, l’une des plates-formes d’échange les plus populaires au monde, a introduit les achats-ventes de « bitcoin cash ». Ce lancement a pris de court, et a été entaché par des rumeurs de délit d’initié auquel des employés de Coinbase se seraient peut-être livrés…

La chute du cours va-t-elle se poursuivre ? Difficile à dire, tant, depuis sa création, la valeur du bitcoin ne cesse de jouer au yoyo. Il n’est d’ailleurs pas exclu qu’elle remonte en flèche ces prochains jours. Dans tous les cas, une chose est sûre : en 2018, les régulateurs se pencheront plus amplement sur le sujet. Et prendront les mesures nécessaires pour encadrer les échanges de l’e-devise.