L’usine Lactalis de Craon, en Mayenne, impliqué dans la contamination de lait infantile à la salmonelle . / DAVID VINCENT / AP

Une enquête préliminaire ouverte, plus de sept cents lots de laits rappelés en urgence et une usine à l’arrêt… Depuis plusieurs semaines, le premier groupe laitier français, Lactalis, est empêtré dans l’affaire des laits infantiles contaminés à la salmonelle.

Dernier épisode en date, l’annonce, mardi 26 décembre, de l’ouverture d’une enquête préliminaire par le pôle santé publique du parquet de Paris. Retour sur ce que l’on sait dans cette affaire.

  • Une trentaine de nourrissons contaminés

L’affaire démarre début décembre. Le ministère de la santé et la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) annoncent, le 2 décembre, avoir retiré de la vente – et pour ceux qui ont été vendus, rappelé – des lots de laits infantiles de premier âge en raison d’un risque de contamination par des salmonelles. Les produits concernés, de marque Picot, Pepti et Milumel, sont tous fabriqués sur un même site de production du groupe Lactalis Nutrition Santé (LNS), basé à Craon, en Mayenne.

Cette annonce par les autorités intervient après le signalement de la contamination par des salmonelles de « vingt jeunes enfants âgés de moins de 6 mois dans huit régions différentes ». Les familles de treize de ces enfants, dont la vie n’est pas en danger, ont indiqué qu’ils « ont tous consommé du lait infantile premier âge » des marques concernées. Ces infections à la salmonelle provoquent notamment des gastro-entérites, avec des vomissements et une diarrhée. Mais à la suite de ces premiers retraits, de nouveaux cas sont détectés.

Lactalis retire 625 lots de laits infantiles, avant d’annoncer, le 21 décembre, « étendre le retrait ou le rappel à l’ensemble des produits infantiles et nutritionnels fabriqués ou conditionnés dans [son] site de Craon depuis le 15 février 2017 ».

En décidant de sortir des rayons toute la production de son usine depuis février, la liste ne se limite plus aux laits infantiles. Viennent s’ajouter les céréales pour enfants, mais aussi des compléments nutritionnels, comme la Maltodextridine, ou de la poudre de lait destinée aux industriels et aux consommateurs.

  • Deux plaintes déposées, une enquête ouverte

Le 20 décembre, l’autorité de surveillance Santé publique France a recensé trente-cinq nourrissons atteints de salmonellose en France depuis la mi-août, dont seize qui ont dû être hospitalisés. Ce nombre inhabituellement élevé l’a amenée à parler d’« épidémie », même si tous les jeunes enfants sont en bonne santé désormais. Pour trente et un enfants, il a été prouvé qu’ils avaient consommé un lait infantile de l’usine Lactalis de Craon.

Le 22 décembre, près de vingt jours après les premiers rappels, le pôle santé publique du parquet de Paris a donc ouvert une enquête préliminaire pour « blessures involontaires », « mise en danger de la vie d’autrui » et « tromperie aggravée par le danger pour la santé humaine ». Les investigations ont été confiées aux gendarmes de la section de recherche d’Angers (Maine-et-Loire) et à l’Office central de lutte contre les atteintes à l’environnement et à la santé publique (Oclaesp).

Sur RMC, mercredi matin, Quentin Guillemain, dont la fille de 3 mois a consommé du lait contaminé et qui a monté une association de familles de victimes, a dit être « satisfait » de l’ouverture de cette enquête.

« On va peut-être savoir ce qui s’est passé dans cette usine. Comment, quand, où… Il est temps qu’une enquête soit ouverte. »

M. Guillemain avait déposé une plainte à la mi-décembre auprès du pôle santé publique du parquet de Paris pour « mise en danger de la vie d’autrui » et « non-assistance à personne en danger » contre Lactalis et la pharmacie où il avait acheté le lait. La semaine dernière, l’association de consommateurs UFC-Que Choisir avait également annoncé son intention de déposer une plainte contre le groupe laitier implanté à Laval.

  • L’usine de Craon à l’arrêt

Rapidement après l’annonce des premiers rappels de lots de laits infantiles, Lactalis a reconnu qu’une « contamination dispersée s’est installée dans [l’]usine de Craon suite à des travaux réalisés courant premier semestre 2017 ». La production de l’usine mayennaise a été arrêtée le 8 décembre pour un grand nettoyage des installations. Et un arrêté préfectoral, pris le 9 décembre, conditionne le redémarrage de l’activité à la mise en place de mesures correctives.

Mais l’usine ne devrait pas redémarrer avant février 2018, et une partie de ses 350 salariés pourrait être mise au chômage technique. En 2005, déjà, un an avant le rachat par Lactalis, l’usine de Craon avait été contaminée par de la salmonelle. Une contamination similaire, mais à moindre échelle, avait affecté, à l’époque, trente-cinq enfants nourris avec du lait infantile de marque Picot.