Le président Erdogan était reçu vendredi à Paris, à un moment où la Turquie est de plus en plus isolée sur la scène internationale. / POOL / REUTERS

Le président français, Emmanuel Macron, a déclaré vendredi que les « évolutions récentes » en Turquie dans le domaine des droits de l’homme excluaient toute « avancée » dans les négociations d’adhésion de ce pays à l’Union européenne.

« Il faut sortir de l’hypocrisie qui consiste à penser que l’on peut ouvrir de nouveaux chapitres dans la négociation avec l’Union européenne [UE], ce n’est pas vrai », a tranché le président lors d’une conférence de presse aux côtés de Recep Tayyip Erdogan, invité à Paris vendredi. En réponse, M. Erdogan a déclaré que la Turquie était « fatiguée » d’attendre une éventuelle adhésion à l’Union européenne. « On ne peut pas en permanence implorer une entrée dans l’UE », a-t-il estimé devant la presse.

« Respecter l’Etat de droit »

M. Macron a évoqué la « relation économique forte » qu’entretiennent la France et la Turquie, et salué la « coopération exemplaire » des deux pays – et de l’UE – en matière de lutte contre le terrorisme. Il a également invité son homologue à une coopération dans la construction de la paix en Syrie.

Mais le président français a surtout souligné des « visions différentes » sur les libertés individuelles entre les deux pays. Le chef de l’Etat a assuré qu’il avait évoqué avec le président turc les cas de plusieurs universitaires ou journalistes poursuivis en Turquie, et a appelé M. Erdogan à « respecter complètement l’Etat de droit » sur cette question. M. Erdogan a assuré qu’il demanderait au ministère de la justice des informations sur la liste de noms et d’organisations que lui a fournie M. Macron.

Ce dernier a également insisté sur l’importance de « l’ancrage de la Turquie au sein de la Convention européenne des droits de l’homme ». A défaut d’une adhésion, le président français a ainsi proposé à la Turquie un « partenariat » avec l’UE.

« Il faut (…) regarder si on ne peut pas repenser cette relation non pas dans le cadre du processus d’intégration mais peut-être d’une coopération, d’un partenariat avec [pour] finalité (…) de préserver l’ancrage de la Turquie et du peuple turc dans l’Europe et de faire que son avenir se construise en regardant l’Europe et avec l’Europe. »

Un contrat d’étude signé

Cette visite diplomatique a également donné lieu à la signature d’un contrat d’étude dans la défense aérienne et antimissile. Le contrat, dont le montant n’est pas connu, porte sur l’étude de définition du système de défense aérienne et antimissile longue distance portée Loramids (Long-Range Air and Missile Defense System, ndlr) entre les sociétés turques Aselsan et Roketsan et franco-italienne Eurosam et le gouvernement turc, selon l’Elysée.

Ces systèmes de défense antiaérienne sont déjà utilisés par les armées française et italienne. L’Italie en a même déployé certains en Turquie pendant un temps, pour l’aider à intercepter d’éventuels missiles tirés de la Syrie voisine, en pleine guerre.

Les pays de l’OTAN n’avaient pas caché leur inquiétude lorsque le président turc Recep Tayyip Erdogan avait annoncé en septembre qu’il avait signé avec la Russie un contrat portant sur l’achat de systèmes de défense antiaérienne S-400.

Ces systèmes de missiles de technologie russe n’étant pas compatibles avec ceux de l’Alliance atlantique, l’annonce avait été perçue comme une manifestation de mauvaise humeur de la part du président turc, sur fond de graves tensions avec plusieurs dirigeants européens et les Etats-Unis.