LES CHOIX DE LA MATINALE

L’humour cru de Blanche Gardin, un voyage sur les « impossibles » routes du Brésil, une comédie entre Iran et Corrèze, et une plongée dans l’histoire des arts de la table. Voilà notre sélection de replays.

« Je parle toute seule » : Blanche Gardin drôlissime

Blanche Gardin | Je parle toute seule
Durée : 01:56

Après Il faut que je vous parle, son premier seule en scène (l’histoire d’une trentenaire ravagée par une rupture amoureuse), en 2015, Blanche Gardin est revenue en 2017 en célibataire qui se soigne dans un nouveau stand-up logiquement intitulé Je parle toute seule. Dans ce spectacle que diffuse Canal+, elle poursuit sans tabou son introspection. Après le temps de la rupture vient celui de la solitude. Qu’elle apprivoise tant bien que mal.

Son humour noir ne l’a pas quittée. C’est son exutoire. Elle s’est mise à porter des colliers (« quitte à me faire baiser autant ressembler à une femme de lettres »), se sent « mûre » pour sortir avec « un demi-vieux philosophe » et se demande si elle n’est pas « une homosexuelle contrariée. Mais c’est trop tard, je me suis habituée aux bites depuis trop longtemps. »

Son corps ne va pas fort, « quand il pleut je boite ». Quant aux discussions de soirée entre potes, elles tournent désormais autour des allergies alimentaires et de la clope électronique. Blanche Gardin ne cache rien : ni sa première masturbation quand elle était gamine avec son oreiller, ni le supplice de sa première sodomie. Elle dit tout cela d’une voix douce et quasi monocorde, habillée d’une robe très sage.

Secouée comme tout le monde par les attentats (« après les semaines qu’on vient de passer on commence à prendre nos petites habitudes, on ne dit plus ça va ? mais ça vit ? »), flippée par les milliards qu’investit Google pour éradiquer la mort, déroutée par la nouvelle application pour nourrir les pauvres, Blanche Gardin est à l’image de notre époque : désenchantée et cynique. A la fin, elle repart comme elle est venue, par la salle, tranquillement, laissant son public un peu sonné. Sandrine Blanchard

« Je parle toute seule », de Blanche Gardin, mise en scène Maïa Sandoz. Sur myCANAL.

« Les Routes de l’impossible » : l’Amazonie en autocar

[BA] Les routes de l'impossible - Brésil, l'union fait la force - 31/12
Durée : 00:34

Voilà dix ans que la série documentaire Les Routes de l’impossible suit des fous du volant, qui, souvent contraints par leur travail, sont prêts à emprunter les routes les plus dangereuses de la planète. Pentes escarpées, ponts presque détruits, pistes englouties sous des litres d’eau... ils doivent pouvoir tout affronter.

Cette fois-ci, les deux protagonistes de l’aventure sont Luis et Leandro. Père et fils, ils sont les derniers à transporter des passagers entre les villes brésiliennes d’Humaita et de Manaus dans leur car abîmé. Les routes abandonnées et boueuses de l’Amazonie en ont découragé plus d’un. Le périple long de 700 kilomètres s’avère d’autant plus compliqué en période de pluies, où le temps de trajet peut être doublé.

Dans le film de Daniel Lainé, le voyage a explosé tous les records et a duré plus de quatre jours. C’est au milieu de cette « route de la douleur », comme la surnomment les chauffeurs qui l’empruntent, que ce documentaire dresse le portrait émouvant d’hommes téméraires et solidaires, capables de rester optimistes malgré les épreuves. Guidés par cette seule phrase : « Il n’y a pas de problèmes, il n’y a que des solutions. » Gauthier Le Bret

« Les Routes de l’impossible : Brésil, l’union fait la force », de Daniel Lainé (France, 2017, 52 minutes). Sur Pluzz.

« Les Pieds dans le tapis » : du burlesque revigorant

Les pieds dans le tapis - bande-annonce - ARTE
Durée : 00:31

Pendant l’absence de son père – censé être parti s’offrir des bains de boue en Corée –, Morteza tente de gérer les affaires de l’entreprise de tapis située dans le grand bazar de Téhéran. Mais voilà qu’il apprend un jour par téléphone la mort du paternel, terrassé par une crise cardiaque à… Brive-la-Gaillarde, en Corrèze. Sa mère et lui partent aussitôt pour la France afin de faire rapatrier le corps et élucider quelques mystères familiaux.

Débute alors un voyage initiatique où tendresse et légèreté, comique et tragique se mêlent avec subtilité. Le réalisateur, Nader Takmill Homayoun, prend un malin plaisir à se jouer des clichés sur les différences culturelles, à émettre certaines critiques à l’encontre de la société traditionaliste iranienne et à dénoncer – par l’absurde et le burlesque – l’embargo français contre l’Iran. Un embargo qui, ici, empêche le rapatriement du corps du chef de famille.

Les Pieds dans le tapis livre une approche délicate sur la difficulté des hommes à communiquer entre eux. L’essentiel est encore de se dire les choses et de ne rien garder secret : un message énergique et revigorant. A l’image du film qui le porte. G. L. B.

« Les Pieds dans le tapis », de Nader Takmill Homayoun (France, 2016, 90 minutes). Sur Arte.tv

« Les Trésors des arts de la table » décortiqués

Le sujet est très « période de fêtes de fin d’année », mais ce long propos sur les arts de la table dans les traditions françaises est hautement instructif. Quand les fourchettes sont-elles apparues ? A quel moment le service « à la française » a-t-il supplanté le service « à la russe » ? Pourquoi et comment le cristal se taille-t-il ? Quels sont les trois types d’or utilisés pour une chocolatière du XVIIIe siècle ? Qu’est-ce que le « soufflé-tourné » ? Quel est le restaurant qu’Alain Ducasse anime en plus de la myriade d’établissements ouverts sous son égide ?  A tout cela réponse est donnée, avec des spécialistes – des conservateurs du château de Versailles en particulier –, dans ce documentaire riche et vivant animé par Sophie Jovillard. Renaud Machart

« Les Trésors des arts de la table », de Simon Thisse (France, 2017, 95 minutes). Sur pluzz à la demande jusqu’au 10 janvier.