Dans le box des prévenus, deux jeunes garçons d’Argenteuil (Val-d’Oise). L’un a le bras droit plâtré. Sur le banc des parties civiles, deux policiers. L’une a le bras gauche dans le plâtre et l’œil droit tuméfié, l’autre porte une minerve. De part et d’autre, des récits qui s’opposent. Les deux prévenus, âgés de 18 ans et 21 ans, devaient être jugés lundi 8 janvier en comparution immédiate par le tribunal de Pontoise.

Il est reproché à Ayman K. d’avoir commis des violences contre les fonctionnaires de police dans le cadre d’un contrôle, vendredi 5 janvier, à Argenteuil. Il aurait également lancé aux agents : « Bande de fils de putes ! » Il est reproché à Wael K. d’avoir opposé une résistance violente à un autre policier et de l’avoir menacé en ces termes : « Sur La Mecque, tu n’es rien, je te défonce sans ton uniforme. »

Les avocats de la défense, Arié Alimi et Vincent Brengarth, ont expliqué lundi que ce qui semblait être des violences contre des fonctionnaires de police serait en réalité une « bavure » policière. Face à ces versions contradictoires, le tribunal a fait droit à la demande de renvoi des avocats et une information judiciaire a été ouverte lundi soir par le parquet, afin que des investigations supplémentaires soient menées. L’Inspection générale de la police nationale (IGPN) a également été saisie.

« On n’a pas refusé la contrôle »

Tout le monde s’accorde cependant sur un constat : la situation à Argenteuil a totalement dégénéré vendredi.

« Un équipage de police a constaté qu’un véhicule circulait à vive allure, rapporte le préfet du Val-d’Oise, Jean-Yves Latournerie. Les policiers ont procédé à un contrôle et constaté une forte odeur de cannabis, ce qui les a amenés à approfondir leur contrôle. »

La police ne trouve pas de produits stupéfiants mais des sachets en plastique et une balance sur un des quatre occupants. Hichem B., un jeune de 15 ans présent dans la voiture, précise : « On n’a pas refusé le contrôle. Ça a dégénéré parce qu’ils ont contrôlé le petit. »

Un garçon de 7 ans, présent dans la voiture, aurait été sorti violemment du véhicule, suscitant l’opposition des autres occupants. Hichem rapporte qu’un policier aurait collé sa tête contre la sienne et lui aurait asséné deux coups de matraque dans la cuisse et un coup sur l’épaule droite, qu’il porte aujourd’hui en écharpe.

Fixation de « peines minimum »

La scène, qui se déroule à proximité d’un espace jeunesse de la ville, rameute du monde. « J’ai vu un policier secouer Hichem et mettre un coup de matraque à Ayman, raconte à son tour Sid Ahmed Mersali, 30 ans, directeur de la structure. Ayman a riposté en se débattant et en essayant de mettre des coups. La policière l’a attrapé par le cou et elle a été blessée à la main par un coup de matraque de son collègue. »

Des renforts policiers arrivent sur place. Plusieurs jeunes disent avoir été insultés et avoir reçu des coups de matraque ou des projectiles de lanceurs de balles de défense. Certains ont déposé plainte à l’IGPN. L’animateur Wael K., qui rentrait d’une sortie loisirs avec des jeunes, se retrouve dans cette mêlée confuse. Des témoins assurent qu’il aurait subi des décharges de pistolet électrique.

« Le contrôle a dérapé à cause d’individus qui se sont rebellés », martèle de son côté Yves Lefebvre, secrétaire général d’Unité SGP-Police, qui était présent à l’audience. Alors que plusieurs affaires se sont succédé depuis le début de l’année, dans lesquelles des policiers ont été blessés, le deuxième syndicat de gardiens de la paix a appelé à des rassemblements mardi devant les commissariats. Il demande la fixation de « peines minimum » en cas de violences commises contre des policiers. Les organisations syndicales doivent être reçues mercredi au ministère de l’intérieur.