L’entreprise sud-coréenne, spécialisée dans l’électronique, a été contrainte de se défendre, jeudi 11 janvier, après que deux ONG ont apporté de nouveaux éléments à leurs accusations de violations des droits de l’homme dans les usines chinoises du constructeur.

S’appuyant sur de nouveaux rapports de militants infiltrés entre 2012 et 2016 dans les usines du groupe électronique, les ONG Peuples solidaires et Sherpa dénoncent « l’emploi d’enfants de moins de 16 ans, des horaires de travail abusifs, l’absence d’équipements appropriés aux risques encourus, des conditions de travail et d’hébergement incompatibles avec la dignité humaine », selon leur communiqué.

Sherpa et Peuples solidaires annoncent donc le dépôt, ce jeudi, de ces nouveaux éléments au parquet de Paris, à l’appui d’une plainte pour pratiques commerciales trompeuses qui vise Samsung Monde, la maison mère, et sa filiale Samsung Electronics France (SEF). « Cette procédure s’inscrit dans notre lutte de longue date contre l’impunité des multinationales », ont expliqué Sherpa et Peuples solidaires.

Samsung a réagi jeudi en affirmant dans un communiqué appliquer une « tolérance zéro » vis-à-vis du travail des enfants. « Samsung respecte scrupuleusement les normes et réglementations locales et internationales en matière de travail et exige la même conformité de ses fournisseurs », a ajouté le conglomérat.

Première plainte en 2014

Une première plainte, visant uniquement SEF, avait été classée sans suite en 2014 à Bobigny (Seine-Saint-Denis). Sherpa avait du coup choisi de citer l’entreprise directement devant ce tribunal correctionnel, mais y a finalement renoncé en 2017 pour des raisons de procédure, selon un porte-parole.

Dans leur nouvelle plainte de 40 pages, Sherpa et Peuples solidaires accusent Samsung de contredire ses engagements éthiques et son propre code de conduite, alors que le groupe sud-coréen présente sur ses sites Internet son ambition de « devenir l’une des entreprises les plus éthiques au monde ».

Des contradictions qui constituent, selon les associations, des « pratiques commerciales trompeuses » pour les consommateurs français du leader de la téléphonie mobile, et qui légitimeraient donc une procédure pénale en France.

« Alors que les multinationales utilisent notamment ces engagements éthiques pour maintenir leur compétitivité, les ouvriers et consommateurs sont démunis face au non-respect de ces engagements. La reconnaissance du délit de pratiques commerciales trompeuses permettrait de rétablir ce rapport de force déséquilibré », écrivent les associations.

Les éléments nouveaux justifiant cette plainte sont tirés « de nouveaux rapports d’enquête très documentés de l’ONG China Labor Watch (CLW) qui s’est infiltrée dans les usines » de filiales du groupe et de ses fournisseurs, principalement dans la région de Tianjin, près de Pékin, affirment les associations.

Soixante-douze heures par semaine

Ces rapports contiendraient des témoignages, des photos et des vidéos réunis par CLW entre 2012 et 2016. L’ONG affirme ainsi que dans ces usines « les employés travaillent en moyenne soixante-douze heures par semaine », parfois plus en période de forte activité. Au mépris de la loi chinoise limitant à quarante-quatre heures le temps de travail hebdomadaire.

« Dix enfants de moins de 16 ans, dont trois jeunes filles, travaillaient dans les usines » de certains fournisseurs de Samsung en 2012, selon CLW. Entre cinq et dix enfants en dessous de l’âge légal étaient encore identifiés lors de plusieurs visites des enquêteurs en 2014 dans une autre usine.

Les enquêteurs documentent encore la présence de benzène, un produit toxique à l’origine de cancers et de leucémie, dans les modes de production. Dans les usines, le benzène est utilisé comme agent nettoyant et comme enduit pour des composants électroniques.

Sherpa et Peuples solidaires plaident pour que « les négociations onusiennes aboutissent à un traité contraignant les multinationales au respect des droits humains sur toute leur chaîne de production » et réclament l’appui de la France à ce processus.