« Genital Panic », 1969. / Valie Export/Adagp Paris 2017. Courtesy Galerie Thaddaeus Ropac

Le galeriste Thaddaeus Ropac a le sens du timing. L’exposition de Valie Export qu’il organise dans son espace parisien tombe à pic, au moment où les femmes (re)montent au front contre le machisme. L’artiste autrichienne septuagénaire fut une pasionaria féministe depuis ses débuts dans les années 1960, avec ses performances osées et radicales.

A l’époque, elle troque son vrai patronyme, Waltraud Lehner, contre un nom inspiré d’une marque de cigarettes. La bonne société autrichienne est alors très corsetée, et l’underground viennois dominé par des actionnistes misogynes. Aussi Valie Export sera-t-elle longtemps ignorée. Jusqu’à ce que les institutions l’exhument, notamment au début des années 2000, dans la vague de redécouverte des artistes femmes.

Thaddaeus Ropac n’est pas pour autant opportuniste. Cela fait vingt-cinq ans qu’il collectionne ses œuvres. Autant d’années qu’il songe à la représenter. Mais elle était déjà entre les mains d’une galerie viennoise. En octobre 2017, Ropac obtient la représentation exclusive de son travail. Dans la foulée, il organise deux expositions début 2018 dans ses galeries de Paris et de Londres.

Une personnalité intransigeante

Les délais sont courts. Impossible de traiter cette œuvre peu connue à la va-vite. Et Valie Export en a trop vu comme artiste femme pour tolérer la légèreté. Aussi suggère-t-elle de travailler avec la commissaire d’exposition Caroline Bourgeois, qui avait réalisé en 2003 une exposition monographique au Centre national de la photographie, à Paris. Celle qui est aussi conseillère artistique de François Pinault connaît très bien ses travaux. Malgré la barrière de la langue − Valie Export ne parle que l’allemand −, elle devine les nuances d’une personnalité intransigeante.

Chez Ropac, Caroline Bourgeois se concentre sur les Body Configurations des années 1970, lorsque l’artiste utilisait son corps comme une sculpture vivante pour modeler l’espace urbain. S’y trouve aussi sa photo mythique Genital Panic, de 1969. L’artiste était alors arrivée mitraillette à la main dans un cinéma porno munichois. On la voit en jean et blouson de cuir, jambes écartées, le pantalon découpé laissant voir son pubis. L’artiste se pose en sujet, et non plus en objet, à rebours des stéréotypes de la séduction.

Body Configurations, de Valie Export, à la Galerie Thaddaeus Ropac, 7, rue Debelleyme, Paris 3e. Du 12 janvier au 24 février. www.ropac.net