Catherine Deneuve, le 14 février à Berlin. / JOHN MACDOUGALL / AFP

Après un tollé d’une semaine, Catherine Deneuve reprend la parole. L’actrice, qui faisait partie des signataires d’une tribune collective publiée dans Le Monde sur la « liberté d’importuner » des hommes au nom de la « liberté sexuelle », justifie dans les pages de Libération sa prise de position polémique. Dans ce texte publié dimanche 14 janvier, Catherine Deneuve « présente (ses) excuses » aux « victimes d’actes odieux qui ont pu se sentir agressées » par le texte.

C’est parce qu’elle a senti la « nécessité de précisions » que la célèbre actrice a choisi de réexpliquer sa position, qui a fait l’effet d’une bombe dans le débat public. A contre-courant de l’élan né de l’affaire Weinstein, le texte dénonçait ainsi un risque de « purianisme », une prise de position très critiquée et commentée ces derniers jours.

« On m’a parfois reproché de ne pas être féministe », déplore celle qui rappelle être « une des 343 salopes avec Marguerite Duras et Françoise Sagan qui a signé le manifeste “Je me suis fait avorter” écrit par Simone de Beauvoir. »

« Invitation à la délation »

Dans sa lettre, l’actrice rappelle ainsi les deux raisons principales qui ont motivé sa signature de la tribune. « Je n’aime pas cette caractéristique de notre époque où chacun se sent le droit de juger, d’arbitrer, de condamner », explique Catherine Deneuve, qui déplore notamment une « invitation à la délation » dans le hashtag #balancetonporc.

« Qui peut m’assurer qu’il n’y aura pas de manipulation ou de coup bas ? Qu’il n’y aura pas de suicides d’innocents ? »

C’est également au nom du « danger des nettoyages dans les arts » que l’actrice a cosigné la tribune, une raison qui est « à (ses) yeux essentielle ». « Ce climat de censure me laisse sans voix et inquiète pour l’avenir de nos sociétés », écrit encore l’actrice.

« Pire qu’un crachat au visage »

Mais c’est aussi à une forme de mea culpa que se livre Catherine Deneuve. Elle n’hésite pas, surtout, à régler ses comptes avec ses cosignataires :

« Il me paraît absolument nécessaire aujourd’hui de souligner mon désaccord avec la manière dont certaines pétitionnaires s’octroient individuellement le droit de se répandre dans les médias, dénaturant l’esprit même de ce texte ».

L’actrice dénonce ainsi, sans la citer nommément, les déclarations de Brigitte Lahaie, qui avait exprimé sur BFM-TV qu’« on peut jouir pendant un viol ». Un propos « pire qu’un crachat au visage de toutes celles qui ont subi ce crime », juge Catherine Deneuve, qui critique une « incontinence verbale » qualifiée d’« indigne ».

« A elles et à elles seules »

Catherine Deneuve reconnaît elle-même avoir signé un texte qu’elle qualifie de « vigoureux, à défaut de le trouver parfait ». Mais elle maintient que « rien dans le texte ne prétend que le harcèlement a du bon, sans quoi je ne l’aurais pas signé. » Une affirmation loin de faire l’unanimité, puisque de nombreuses femmes ont vu dans la publication de cette tribune une « banalisation des violences sexuelles ».

De son côté, Catherine Deneuve déplore avoir reçu le soutien des « conservateurs, racistes et traditionalistes de tout poil », et rappelle qu’elle est « une femme libre ». « Ce qui crée des situations traumatisantes et intenables, c’est toujours le pouvoir, la position hiérarchique, ou une forme d’emprise », reprend Catherine Deneuve. Avant de conclure par ces excuses :

« Je salue fraternellement toutes les victimes d’actes odieux qui ont pu se sentir agressées par cette tribune parue dans le Monde, c’est à elles et à elles seules que je présente mes excuses. »