En Norvège, les défenseurs des animaux ont repris du poil de la bête. Le gouvernement a décidé d’interdire la production de fourrure d’ici à 2025, en démantelant de manière progressive ses élevages. Le pays abrite 200 à 250 fermes, qui exploitent 610 000 visons et 150 000 renards, selon les derniers chiffres du ministère de l’agriculture, ce qui en fait un important pays producteur en Europe. La monarchie suit ainsi l’exemple du Royaume-Uni (2000), de l’Autriche (2004) et des Pays-Bas (décision votée en 2013, qui sera totalement effective en 2024). L’Allemagne et la République tchèque ont aussi décidé en 2017 de s’engager dans cette voie.

La décision a été prise alors que le gouvernement minoritaire de droite norvégien, composé des conservateurs de la première ministre, Erna Solberg, et des populistes du Parti du progrès, a ouvert ses portes, dimanche 14 janvier, à un petit parti de centre droit, le Parti libéral. Ce dernier, qui défend notamment la cause animale, a poussé la nouvelle coalition à se doter d’un programme plus « vert » – avec également la sanctuarisation d’espaces naturels convoités par l’industrie pétrolière.

Le plan doit encore être voté par le Parlement norvégien, une fois les compensations financières arrêtées pour les élevages affectés. Sept des neuf formations politiques du pays se sont déjà prononcées en faveur de l’interdiction de la production de fourrure, faisant de l’adoption de la mesure une formalité.

Population et scientifiques opposés à la fourrure

« C’est une grande victoire pour les animaux et ceux qui se battent pour les défendre, se réjouit Siri Martinsen, vétérinaire et directrice de la NOAH, la plus grande ONG de protection animale de Norvège, qui se bat pour obtenir cette mesure depuis vingt-huit ans. Le personnel politique a enfin écouté la majorité de l’opinion publique et des scientifiques, qui considèrent qu’il s’agit d’un secteur désuet et cruel. »

Selon les derniers sondages, 68 % de la population est opposée à la fourrure, dans un pays qui était pourtant autrefois le premier producteur mondial de peaux de renard. Les élevages, qui ne trouvent presque plus de débouchés sur leur territoire, exportent alors à 99 % leur production, principalement en Russie et en Chine – ce dernier pays dominant le marché mondial.

Une position de rejet partagée par l’institut vétérinaire norvégien et l’association vétérinaire norvégienne, regroupant la majorité des spécialistes, ainsi que les départements de biologie des universités d’Oslo et de Bergen.

« Nous dénonçons les très mauvaises conditions de détention des animaux, qui ne sont pas compatibles avec leurs besoins physiologiques », assure Siri Martinsen. Les visons et les renards passent ainsi toute leur vie dans de minuscules cages grillagées (d’un mètre carré au maximum), dans lesquelles ils ne voient le plus souvent pas la lumière du jour. Leurs excréments s’entassent souvent à même le sol pendant des semaines.

« Nous sommes choqués, ébranlés au plus profond de nous-mêmes », a déclaré, de son côté, Guri Wormdahl, de l’association norvégienne des éleveurs de fourrure, citée par Reuters. Les élevages du pays emploient environ quatre cents personnes « dans le cadre de règles strictes en matière de bien-être animal », a-t-elle plaidé, avec un chiffre d’affaires annuel compris entre 350 millions et 500 millions de couronnes norvégiennes (36 millions à 52 millions d’euros).

De plus en plus de marques, telles que récemment Gucci ou Michael Kors, se désengagent de la fourrure, à la suite des pressions des défenseurs des droits des animaux et à l’évolution des goûts des consommateurs et de l’attente de la société.