La romancière canadienne Margaret Atwood en octobre 2017 à Prague. / MICHAL CIZEK / AFP

La romancière canadienne Margaret Atwood, malmenée pour son manque d’empathie avec les femmes victimes de harcèlement sexuel, a passé le dimanche 14 janvier à expliquer les raisons d’une chronique où elle argumentait que le mouvement #MeToo est le reflet d’une justice qui ne fonctionne pas. « Le mouvement #MeToo est le symptôme d’un système judiciaire cassé », a-t-elle écrit dans une tribune titrée « Suis-je une mauvaise féministe » et publiée dans le quotidien canadien Globe and Mail samedi. « Trop souvent, les femmes et les autres victimes d’abus sexuels, faute d’obtenir une audience juste des institutions, y compris les entreprises, utilisent un nouvel outil : Internet », poursuit-elle.

Les réactions ont alors déferlé, plus souvent à charge que pour soutenir la romancière dont l’adaptation de son ouvrage le plus connu, La Servante écarlate (titre original : The Handmaid’s Tale) a été couronnée aux derniers Emmy Awards en septembre.

Dans cette fiction, elle décrit un futur apocalyptique d’une société dominée par une secte qui transforme les femmes fertiles en esclaves sexuelles.

« Etoiles tombées du ciel »

En référence aux actrices qui ont dénoncé les agressions du producteur déchu Harvey Weinstein, la romancière de 78 ans parle d’« étoiles tombées du ciel », sonnant comme un sérieux rappel à l’ordre. « Mais après ? », s’interroge Mme Atwood. Les institutions, les entreprises et les lieux de travail doivent faire le ménage ou « on peut s’attendre à ce qu’encore plus d’étoiles tombent et aussi pas mal d’astéroïdes ».

Et Margaret Atwood de se référer à l’histoire pour dénoncer les risques d’une justice expéditive et populaire. La conception « coupable car accusé » renvoie « à la révolution française, les purges du stalinisme dans l’ex-URSS, la révolution culturelle en Chine, la dictature des généraux en Argentine ou les premiers jours de la révolution iranienne ». « La condamnation sans procès, c’est le début de la réponse à un manque de justice, que le système soit corrompu comme dans la période pré-révolutionnaire en France, ou qu’il n’y en ait simplement pas comme au Far West, alors les populations prennent elles-mêmes les choses en mains », a-t-elle écrit.

Très active sur son compte Twitter, elle a répondu à ses détracteurs dimanche. Certaines femmes l’accusaient d’avoir signé une pétition en soutien à un professeur d’université poursuivi pour harcèlement. « Partager un tweet n’est pas l’approuver. Nous devons être conscients des avis qui ne sont pas les nôtres », a-t-elle posté sur le site de micro-blogging, comme également ce rappel : « Si tout le monde adoptait la Déclaration universelle des droits de l’homme, il y aurait égalité des sexes ».