Donald Trump dans son bureau de la Maison Blanche, à Washington, le 17 janvier. / KEVIN LAMARQUE / REUTERS

Le président des Etats-Unis a tenu parole. Mercredi 17 janvier, Donald Trump a dévoilé via un lien sur son compte Twitter les noms promis depuis deux semaines des médias qu’il déteste le plus, gratifiés de « prix » de « l’information bidon ». Sans surprises, le New York Times, la chaîne d’information continue CNN et le Washington Post, régulièrement pris à partie par l’occupant du bureau Ovale, prennent une bonne place dans une liste aux allures de tract de campagne publiée sur le site du Parti républicain. Le premier prix de ce classement infamant est d’ailleurs attribué non pas à un journaliste mais à un chroniqueur, le Prix Nobel d’économie Paul Krugman, contempteur infatigable du président dans les colonnes du quotidien new-yorkais.

Le préambule de cette liste assure que « 2017 a été une année de partialité acharnée, de couverture médiatique malhonnête et même de fausses informations éhontées. Des études ont montré que plus de 90 % de la couverture médiatique du président Trump est négative ». Cette même année a également été le théâtre d’une offensive sans précédent contre la presse qualifiée dès le mois de février d’« ennemi du peuple » par la Maison Blanche. La stigmatisation publique des médias présents lors des meetings de M. Trump, engagée pendant la campagne présidentielle, s’est par ailleurs poursuivie.

« Voilà où nous en sommes »

La journée avait été marquée auparavant par deux prises de positions extrêmement fermes des sénateurs républicains de l’Arizona, Jeff Flake et John McCain. Deux avertissements à propos des menaces que l’attitude du président fait peser sur un élément de la vie démocratique des Etats-Unis. John McCain, qui lutte contre une tumeur au cerveau, a publié dans le Washington Post une tribune dans laquelle il a invité le président à mettre un terme à ses attaques. « L’expression fake news à laquelle le président américain a donné une légitimité, est utilisée par des autocrates pour réduire au silence des journalistes », a déploré M. McCain.

S’exprimant au Sénat, Jeff Flake a abondé dans ce sens, notant que le président syrien Bachar Al-Assad, son homologue philippin Rodrigo Duterte et le président vénézuélien Nicolas Maduro y avaient tous eu recours au cours des derniers mois pour écarter les critiques, tout comme les autorités birmanes ou de Singapour. Le sénateur a rappelé que l’expression d’« ennemi du peuple » avait été utilisée par le dictateur russe Joseph Staline pour stigmatiser ses opposants. « Le fait qu’un président américain puisse s’adonner à un tel spectacle défie l’entendement, mais voilà où nous en sommes, a regretté Jeff Flake, un président américain qui ne supporte pas les critiques et qui doit toujours trouver quelqu’un d’autre à blâmer, trace une voie très dangereuse. »

Depuis le début de l’année, Donald Trump n’a pas seulement annoncé et décerné ces distinctions discutables. Le 10 janvier, cet habitué des attaques ad hominem sur Twitter a assuré vouloir « revisiter les lois de [son] pays en matière de diffamation » après la publication d’un livre critique sur sa première année à la Maison Blanche. « Quand quelqu’un dit quelque chose de faux et diffamatoire sur une personne, que cette dernière puisse avoir des recours significatifs devant la justice », a-t-il ajouté. Il est très peu probable cependant que cette annonce soit suivie d’effets.