Sophie la Girage est fabriquée en Haute-Savoie. / VALERIE MACON / AFP

Le jouet français n’a pas dit son dernier mot. Du 31 janvier au 4 février, la filière occupera, pour la deuxième année, un stand « made in France » dans l’un des quatre plus grands salons professionnels du jouet au monde, la Spielwarenmesse, qui se tient chaque année à Nuremberg. En 2017, 73 297 visiteurs – et acheteurs potentiels – venus de 123 pays avaient arpenté les allées occupées par 2 871 exposants. Avec 172 participants, la France occupe le 4e rang, derrière l’Allemagne, la Chine et le Royaume-Uni.

Une présence importante, pour un secteur qui, dans son ensemble, n’affiche pas une santé florissante : les ventes de jouets ont reculé de 0,8 % en France, en 2017, à 3,4 milliards d’euros… Quelque « 80 % de la production mondiale est réalisée en Asie », se désole Serge Jacquemier, président de l’Association des créateurs et fabricants de jouets français (ACFJF), qui dirige aussi Vulli. Installé en Haute-Savoie depuis 1961, le fabricant de Sophie la girafe déplore « jusqu’à 16 % de coûts supplémentaires liés aux taxes, charges sociales, bâtiment…, par rapport à une entreprise suisse et 12 % par rapport à une allemande », explique son directeur général. « Et je ne parle pas de mes concurrents asiatiques, où le prix de revient est entre 30 % et 40 % inférieur », soupire-t-il.

Une concurrence qui a rendu les fabricants plus vigilants. « Il y a vingt ans, les distributeurs prenaient nos produits et les faisaient copier. Maintenant, on leur dit : montrez-nous ce que vous voulez et nous allons tenter de le faire », explique Christophe Fresnais, président de l’entreprise familiale bretonne qui produit les marques Mécabois et Jouécabois. Après la présence du pavillon France à Nuremberg en 2017, sa société a commencé à vendre en Allemagne et en Italie, alors qu’elle n’exportait pas jusque-là.

Améliorer le prix de revient

Chez Jeujura, acteur historique de jouets en bois depuis 1910, « un gros travail d’industrialisation de notre production qui [leur] permet encore de fabriquer en France » a été effectué, indique Catherine Varacca, responsable de cette entreprise familiale. Smoby a également investi « plusieurs dizaines de millions d’euros dans l’outil industriel et logistique, pour être compétitif, et dans la formation de [ses] salariés, indique Thomas Le Paul, son directeur général. On peut avoir la plus belle usine du monde, s’il n’y a personne pour la faire tourner, cela ne sert à rien. »

Pour rester dans la compétition, les fabricants français se sont engagés dans une course continue pour améliorer leur prix de revient, en poussant l’exercice jusqu’au moindre détail. « Pour le dé de notre jeu Bioviva Junior, on va livrer l’autocollant dans la boîte et l’enfant le collera lui-même. Cela va l’amuser et c’est un coût de production en moins. Idem pour les fonds des boîtes de jeux qui servent à caler les pièces du jeu plutôt que d’ajouter une composante plastique thermomoulée », explique Jean-Thierry Winstel, dirigeant-fondateur de l’entreprise montpelliéraine Bioviva.

Pour compenser des tarifs plus élevés, les fabricants mettent en avant leurs délais de livraison. « En février, les distributeurs sont obligés de s’engager auprès des entreprises asiatiques pour passer les commandes qu’ils recevront en septembre-octobre, souligne M. Fresnais. Avec un fabricant français, elles peuvent être passées en juin-juillet pour une livraison fin octobre, en petite quantité. »

Revigoré, il y a quelques années, par les campagnes de sensibilisation au « made in France », du temps d’Arnaud Montebourg et de sa marinière, le jouet français est désormais mis en avant comme un gage de qualité, d’emploi local…, même si, parfois, seul le croquis a été réalisé sur le territoire. Ce qui sera signalé par la mention « conçu en France » et non pas « fabriqué en France ».