La députée LRM Aurore Bergé a été largement critiquée sur les réseaux sociaux le 31 janvier pour son rapport sur les « relations école-parents ». / THOMAS SAMSON / AFP

Parler de l’école peut conduire à s’exposer à de sévères retours de bâton. En témoigne - s’il le fallait - la promptitude avec laquelle a émergé, mercredi, le mot-dièse #RapportBergé sur lequel des d’enseignant(e)s se sont « appuyé(e)s » pour réagir aux préconisations de deux députées.

Une compétition de saillies ironiques entre personnes qui se disent professeurs dans leur bio a eu lieu sur le réseau social Twitter.

La cause de ces analogies avec Marie-Antoinette, Sissi, les personnages de La Folie des Grandeurs, ou encore la reine Elisabeth II ? Un rapport « sur les relations école-parents » rendu public le 31 janvier qui a passablement énervé des enseignants, notamment ceux qui travaillent dans les quartiers populaires.

Pour la députée Aurore Bergé LRM (La république en marche) et l’UDI (Union des Démocrates et Indépendants) Béatrice Descamps, il y aurait un décalage entre les professeurs et les quartiers dans lesquels ils peuvent être mutés. « Les enseignants sont, plus qu’auparavant, issus des classes les plus favorisées de la population française », diagnostiquent-elles.

Aussi, la « masterisation des études d’enseignants » conduirait « à un éloignement croissant entre enseignants et parents qui ne facilite pas la compréhension des uns et des autres et un traitement d’adulte à adulte », notent les parlementaires.

Lorsqu’ils sont affectés dans des quartiers difficiles, ils n’en sont le plus souvent pas originaires, ils n’en connaissent pas les spécificités et vivent de moins en moins là où ils enseignent.

Des mots qui ont choqué les professeurs. Mis à part les réactions et détournements humoristiques qu’ont suscitées leurs déclarations, jugées caricaturales, certains n’ont pas ri du tout. A l’image de cette suite de tweets, rassemblés dans un texte, partagée plus de 2 300 fois. L’utilisateur de Twitter dit être professeur de français au collège. Il s’est surnommé « M. Piekielny » sur le réseau social, clin d’œil au roman « Un certain M. Piekiekny » de François-Henri Désérable. Cette personne raconte son quotidien et dresse le portrait en quelques signes de trois de ses élèves.

Lundi, il fallait faire cours pour la dernière fois à M. (6eB) sans pour autant lui dire au revoir. Sa mère et les gendarmes viendraient le chercher à l’interclasse. (…) M. ne savait pas qu’il ne reverrait sans doute plus jamais ses copains ni ses professeurs et il levait la main pour participer, souriant comme d’habitude, ses lunettes de la sécurité sociale sur le nez.

L’utilisateur livre son attachement à ses élèves et raconte aussi l’histoire d’une entre elles qu’il surnomme S., qui est arrivée en France à l’âge de 6 ans. Celle-ci a de grandes difficultés en orthographe, notamment lors des dictées.

Cette mission « flash » avait pour but de restaurer la confiance entre les parents d’élèves et l’école, vaste programme. Pour cela, elles ont auditionné plus de trente personnes afin de mettre à jour les préconisations d’une précédente mission d’information qui datait, elle, de 2014.

Pour les deux députées, tout enseignant qui prend ses fonctions dans un nouvel établissement devrait aussi pouvoir être « formé à la communication à destination des parents ». « Les familles ne peuvent plus être considérées comme suspectes », ajoutent-elles en guise de conclusion de leur rapport.

Contactée par nos soins, Aurore Bergé semble surprise par l’émotion que cela a suscité sur Twitter. « Je ne m’y attendais pas du tout. Nous avons dressé un constat avec ce rapport, il ne s’agit pas d’un jugement », explique la députée LRM. « Je ne suis pas certaine que tous ont lu ou écouté notre audition », doute tout de même l’élue.

Ce qui est certain, c’est que le site parodique Le Gorafi a -un brin- détourné les propos de l’élue pour la tourner en ridicule. L’article a été retweeté plus de mille fois.

Les professeurs « doivent, comme nous, vivre avec les parents d’élèves dans les zones difficiles et les côtoyer au quotidien pour s’approprier leurs codes. On ne peut pas vivre dans les beaux quartiers et comprendre ses contemporains », caricature le média humoristique avant de moquer les députés LRM du « nouveau monde ».

Enfin, il faut que leur langage soit plus accessible, Il n’est pas nécessairement adéquat de multiplier les termes inusités de la oldspeak qui renforcent le sentiment de relégation socio-culturelle, l’appartenance communautaire fantasmée et à terme le minority-shaming voire le burn-out.

Sans ce hashtag, pas sûr que ce rapport aurait eu un quelconque écho. Mais avec les critiques et moqueries qu’il a suscité, les réseaux sociaux n’ont pas fini d’en parler.