A la porte de la Muette, aux abords de Paris, en novembre 2017. / PHILIPPE LOPEZ / AFP

Diesel ou essence ? Thermique ou électrique ? Les Français ont de plus en plus de mal à savoir à quoi s’en tenir en matière d’achat automobile. Si cette impression de flou n’empêche pas les ventes de voitures neuves de se porter à merveille depuis plusieurs mois, l’incertitude en matière de mobilité a peut-être commencé à affecter le marché de l’occasion – 5,7 millions de véhicules vendus en 2017, soit le double du neuf –, qui est en train de caler sévèrement.

En janvier, les ventes de voitures d’occasion en France ont reculé de 7,1 %, selon le baromètre du site de ventes d’occasion AutoScout24, qui fait référence. C’est le troisième mois de chute d’affilée, puisque novembre (- 9,6 %) et décembre 2017 (- 13,3 %) avaient brutalement inversé la tendance d’un marché jusqu’alors orienté à la hausse.

« Trois mois consécutifs de baisse, ce n’était pas arrivé depuis longtemps, constate Vincent Hancart, directeur général d’AutoScout24 France. On peut désormais parler d’une tendance négative de marché. »

« La baisse existe, mais il faut la replacer dans une perspective plus longue, nuance Guillaume Paoli, cofondateur d’Aramisauto.com, l’un des sites français leader de l’occasion, allié à PSA depuis 2016. Nous avons atteint l’an dernier un record de marché : 5,7 millions de véhicules vendus, à comparer à la moyenne des ventes des sept dernières années, qui était de 5,4 millions. Cela étant dit, la chute de janvier a de quoi surprendre, car elle se produit le premier mois où la prime de conversion pour l’achat d’un véhicule plus propre est étendue aux véhicules d’occasion. »

Rééquilibrage diesel-essence

Cette prime qui, pour la première fois en 2018, peut s’appliquer à l’achat d’un véhicule d’occasion pour peu qu’il réponde à un certain nombre de critères (véhicule électrique ou véhicule thermique classé 1 ou 2), permet de toucher 1 000 à 2 000 euros (selon que vous êtes ou non imposable), à la condition d’avoir mis à la casse votre ancien véhicule polluant.

Manifestement, cette incitation n’a pas eu pour le moment l’effet escompté. Elle pourrait même avoir eu un effet négatif sur la revente des véhicules à forte ancienneté. Les voitures ayant entre 11 et 15 ans d’âge ont accusé une forte chute de leurs ventes en janvier : - 11,2 %.

A peu près toutes les tranches d’âge et tous les types de véhicule étaient en recul le mois dernier. La tendance est particulièrement prégnante pour le diesel. Comme dans le neuf, le marché connaît un rééquiligrage diesel-essence.

Cependant, les véhicules à gazole constituent encore les deux tiers des parts de marché en occasion (63 % en janvier), en baisse de deux points de pourcentage par rapport à la même période de l’an dernier. Seules les ventes de voitures hybrides et électriques d’occasion sont en hausse, mais elles représentent moins de 2% du marché.

Offre en décalage avec la demande

Pour ne rien arranger, l’offre est en complet décalage avec la demande « Nous nous battons pour proposer à nos clients des véhicules essence, mais c’est compliqué car les occasions d’aujourd’hui sont les neuves d’il y a deux ou trois ou quatre ans, quand le diesel représentait plus de 60 % des ventes, explique M. Paoli. Les occasions essence partent de plus en plus vite et à un prix élevé. Les diesel se vendent bien plus lentement. » « Sur notre site français, les diesel représentent 78 % de l’offre, mais 51% seulement des demandes des acheteurs », confirme Vincent Hancart.

Les ventes de véhicules essence d’occasion ont aussi reculé ce mois-ci (- 3,8 % par rapport à janvier 2017). « C’est bien le signe d’une incertitude généralisée, analyse M. Hancart. Confrontés à des signaux contradictoires, les acheteurs de voiture sont de plus en plus attentistes. »

« Nous attendons de l’ensemble des pouvoirs publics une feuille de route claire et lisible, poursuit Guillaume Paoli. Pour de très nombreux ménages français, l’automobile est indispensable. Impossible de s’en passer quand on vit à la campagne ou dans une petite ville. Ce n’est pas un luxe. Le luxe, c’est de vivre au centre de Paris. Actuellement, nous voyons beaucoup de nos clients décaler leur achat, qui, il faut le rappeler, constitue le deuxième poste de dépenses d’un foyer. Ils ont souvent un budget contraint et ne veulent pas se retrouver avec un véhicule qu’ils ne pourront pas utiliser. »