Joshua Wong, Alex Chow et Nathan Law à leur sortie de la Cour suprême après l’annulation de leur peine de prison, le 6 février. / BOBBY YIP/REUTERS

La plus haute cour de justice de Hongkong a annulé mardi 6 février la peine de prison de six mois prononcée contre le leadeur démocrate Joshua Wong pour sa participation « mouvement des parapluies », une série de manifestations qui avaient paralysé plusieurs quartiers de la ville pendant deux mois, à la fin de 2014. Les manifestants réclamaient l’instauration d’un véritable suffrage universel dans cette enclave chinoise semi-autonome.

Pendant la même audience, deux autres figures du mouvement démocratique, Nathan Law et Alex Chow, ont également vu leurs peines de prison annulées. La justice leur reprochait notamment d’avoir escaladé, le 26 septembre 2014, des barrières métalliques pour entrer dans Civic Square, une place située dans un complexe gouvernemental.

Contre l’avis du ministre de la justice

Cette décision est l’aboutissement d’une procédure judiciaire à rebondissements. En première instance, à la mi-2016, Joshua Wong avait été condamné pour rassemblement illégal à une peine clémente : prison avec sursis et travaux d’intérêt général. Mais le ministre de la justice de Hongkong avait utilisé son pouvoir d’appel pour refaire juger cette affaire.

Joshua Wong et Nathan Law arrivent à leur arrivée à la Cour suprême, le 7 novembr 2017. / BOOBY YIP / REUTERS

En deuxième instance, à la fin de 2017, le militant démocrate avait été condamné à une peine de prison ferme. La Cours suprême de Hongkong a ouvert la voie à un troisième jugement, au début de novembre, en autorisant Joshua Wong et ses compagnons démocrates à déposer un dernier recours. Ce recours a abouti à l’annulation de leur peine de prison ce matin.

En donnant raison aux militants, le juge Ma a cependant estimé que les manifestants devaient être dissuadés de participer à des rassemblements illégaux accompagnés de violences. « En vertu de ce jugement, d’autres militants pourront être enfermés », a réagi M. Wong. « Ce n’est pas l’heure des félicitations ou des célébrations. »

Un test pour la justice

Cette affaire était considérée comme un test pour la justice hongkongaise, jusqu’à présent fort bien classée par le Forum économique mondial dans son étude sur l’indépendance de la justice 2017-2018. Hongkong occupe la 13e position sur 137 Etats, loin devant les Etats-Unis (25) ou la France (28).

La justice hongkongaise continue de juger en anglais selon les traditions de la Common Law. Les juges sont nommés par le chef de l’exécutif sur la recommandation d’un panel constitué du ministre de la justice, de juges en fonctions, d’avocats et de membres de la société civile. Jusqu’à présent, les propositions de ce panel ont toujours été validés par l’exécutif. Cependant, le Comité permanent du Parlement chinois a le pouvoir d’intérprêter les textes de loi hongkongais. Ses décisions doivent être prises en compte par la justice locale, elles font jurisprudence.

Les trois militants sont donc libres. Mais à la mi-2017, ils ont passé deux mois derrière les barreaux, avant d’être libérés sous caution, en novembre. Et le marathon judiciaire de M. Wong n’est pas terminé. Il reste inculpé d’outrage à magistrat ; une charge pour laquelle il a été une condamné à trois mois de prison en janvier, et dont il a fait appel. M. Wong avait refusé d’évacuer un lieu occupé par des manifestants, violant l’injonction d’un juge.

Le parti de M. Wong relancé

La décision de la Cour suprême apporte une bouffée d’oxygène au mouvement politique créé par M. Wong, Demosisto. Le mois dernier, l’administration chargée d’organiser les élections a refusé la candidature d’Agnes Chow, membre du parti âgée de 21 ans, soulignant l’inconstitutionnalité de son programme. La plate-forme politique de Demosisto appelle à l’autodétermination et à l’indépendance de Hongkong.

Joshua Wong lors du lancement de son parti, Demosisto, en avril 2016. / BOBBY YIP / Reuters

D’après les termes de l’accord sino-britannique sur la rétrocession, Hongkong jouit de libertés inconnues ailleurs en Chine continentale – en vertu du principe « Un pays, deux systèmes » – ; et ce jusqu’en 2047… en théorie.