Le président Macron termine son discours sur les lieux de l'assassinat du Préfet Claude Erignac, le 6 février 2018 à Ajaccio, lors de la cérémonie marquant les 20 ans de sa mort. / OLIVIER-LABA-MATTEI / MYOP POUR LE MONDE

Au second jour de sa visite en Corse, Emmanuel Macron va dévoiler, mercredi 7 février, sa stratégie pour l’avenir de l’île, attendue avec impatience par les dirigeants nationalistes de l’île, qui réclament des pouvoirs accrus.

Le chef de l’Etat doit prononcer un discours en milieu d’après-midi devant plusieurs centaines de personnes rassemblées dans un centre culturel à Bastia. Ont été invités les maires, mais aussi les deux hommes forts de l’île, l’autonomiste Gilles Simeoni, qui dirige l’exécutif, et l’indépendantiste Jean-Guy Talamoni, à la tête de l’Assemblée de Corse. Ces derniers ont discuté mardi soir durant plus de deux heures avec Emmanuel Macron à Ajaccio, sans faire aucune déclaration à la sortie.

Emmnauel Macron est attendu au tournant sur plusieurs sujets, lors de son discours de mercredi après-midi.

  • Le développement économique de l’île

A Bastia, le chef de l’Etat « s’exprimera sur les sujets qui intéressent surtout les Corses, à savoir le développement économique de leur île », a-t-on indiqué dans son entourage.

Il pourrait ainsi annoncer des mesures pour dynamiser l’économie locale, qui souffre de sous-investissements chroniques et de la faiblesse du tissu industriel. La Corse est de ce fait « la région la plus touchée par la pauvreté monétaire », avec « un ménage sur cinq vivant sous le seuil de pauvreté », selon l’Insee.

Il s’agit notamment de donner une suite au plan d’investissements de 2 milliards d’euros lancé en 2002 par le premier ministre Lionel Jospin pour faire rattraper à l’île son retard en infrastructures. Ce programme s’achève en 2020.

  • Quelle autonomie pour la Corse ?

Mais, au-delà de ces annonces, Emmanuel Macron est très attendu sur le volet politique, sous la pression des nationalistes, qui réclament une autonomie encore plus élargie que celle dont bénéficie la Corse, en s’appuyant sur leurs victoires successives aux élections de ces dernières années.

Ils demandent en particulier que la Corse fasse l’objet d’une « mention spécifique » dans l’article 74 de la Constitution, qui détaille le statut des collectivités d’outre-mer, à l’instar de la Nouvelle-Calédonie. Cela afin, selon eux, d’obtenir de nouveaux pouvoirs dans les domaines du foncier, de la fiscalité ou de la langue. Mais à Paris, l’idée privilégiée est plutôt celle d’un renforcement de l’article 72, celui des collectivités locales, qui leur permet de déroger au droit commun à titre expérimental.

Pour Jean-Guy Talamoni, ce droit à la différenciation n’est « pas suffisant » et « ne permettrait pas de régler les problèmes que rencontre la Corse ». L’éventualité de l’inscription d’une spécificité dans la Constitution est combattue par certains responsables politiques, comme Eric Ciotti (LR), pour lequel « il y a une spécificité corse, il y a une identité, mais il ne faut pas l’inscrire dans la Constitution parce que la Constitution, elle vaut pour tous les territoires de la République ». Mais pour le chef de file des députés MoDem, Marc Fesneau, il faut trouver les moyens de « donner de la respiration démocratique » à la Corse.

Dans son discours, Emmanuel Macron pourrait également répondre aux revendications des nationalistes sur un statut de résident et sur la co-officialité de la langue corse, deux demandes qui n’ont pas de chances d’être satisfaites en l’état.

  • Les prisonniers corses

Le président a, en outre, exclu mardi toute amnistie pour la dizaine de prisonniers que les nationalistes appellent « politiques » car ils ont été condamnés pour des faits de terrorisme. Des avancées pourraient en revanche être annoncées pour rapprocher en Corse des prisonniers détenus sur le continent.

« Que votre enfant puisse voir son père, que les personnes qui sont détenues dans notre pays puissent voir leur famille, ça fait partie des choses que nous allons assurer », a répondu Emmanuel Macron à l’épouse d’Yvan Colonna, condamné à la perpétuité pour l’assassinat du préfet Claude Erignac il y a vingt ans. Stéphanie Colonna l’a interpellé dans la rue mardi en fin de journée, le suppliant de l’aider à ce que son fils de 6 ans puisse voir son père, ce qu’il n’avait pas fait « depuis un an et demi ».