La mairie de Saint-Denis (Seine-Saint-Denis). / CHRISTOPHE ARCHAMBAULT / AFP

La majorité des habitants d’Ile-de-France, hormis les Parisiens, devraient trouver portes closes, mercredi 7 février, dans la plupart des bureaux et des services de leurs départements. Pour dissuader Emmanuel Macron de supprimer les départements limitrophes de la capitale au prétexte d’alléger « le millefeuille » territorial au sein de la Métropole du Grand Paris, les sept grands barons départementaux de la région ont prévu de prendre les habitants à témoin des conséquences négatives sur leur vie quotidienne de la disparition de cet échelon local. « C’est comme l’air qu’on respire. C’est lorsqu’il vient à manquer qu’on s’aperçoit combien il est indispensable », observe Patrick Devedjian, président (Les Républicains) des Hauts-de-Seine.

Avec pour mot d’ordre « fermer un jour pour vous servir toujours », cinq départements ont prévu la fermeture totale ou partielle de leurs services. Les crèches du Val-de-Marne, les centres sociaux de la Seine-Saint-Denis, les consultations infantiles des Yvelines, des cantines des collèges du Val-d’Oise, les musées des Hauts-de-Seine… Aucune de ces structures ne fonctionnera. Seuls les services d’urgence – tel le déneigement des routes – seront assurés. Ceux de Seine-et-Marne et l’Essonne seront ouverts au public mais comme leurs voisins, ils appellent leurs agents et les habitants à manifester devant leur siège ou devant la préfecture.

Cette journée dite « sans département » vient amplifier une mobilisation pendant laquelle les élus ont multiplié les conférences de presse, les réunions publiques et même financé une campagne d’affichage dans les journaux pour créer un rapport de force politique avec l’exécutif. Dans leur bras de fer avec le chef de l’Etat, les départements s’en prennent particulièrement au préfet d’Ile-de-France, Michel Cadot.

Une « coalition du non »

Missionné par M. Macron pour tracer, en concertation avec les élus franciliens, les pistes d’une réforme institutionnelle du Grand Paris, M. Cadot, a, dans les différents scénarios « qu’il a transmis jusqu’ici à l’exécutif, prôné la suppression des départements. Si le chef de l’Etat ne veut pas « se tirer une balle dans le pied », il ne devrait pas laisser « ses commensaux jouer avec la même vieille boîte de Meccano, démontant et remontant les mêmes pièces, dans un ordre différent sans y ajouter aucune idée nouvelle », prévient Pierre Bédier, président (LR) des Yvelines. Dans le « millefeuille » de l’Ile-de-France, « les couches rassies sont la métropole et les intercommunalités. Le département, c’est l’échelon qui marche et qui investit », martèle M. Devedjian. Alors que la France s’apprête à organiser les Jeux olympiques, « nul n’a intérêt à détruire ce qui fonctionne plutôt bien en Ile-de-France », renchérit Christian Favier, président (FdG) du Val-de-Marne.

La vision défendue par M. Cadot est soutenue par certains élus détracteurs des départements. « La position des départements est dictée par la défense de leur fauteuil. C’est une coalition du non qui ne propose aucune solution pour faire avancer la métropole », déplore Philippe Dallier, sénateur (LR) de Seine-Saint-Denis auteur d’un rapport en 2008 qui préconise la fin des départements de la petite couronne, le transfert d’une partie de leurs compétences sociales aux communes et la création d’une métropole.

Deux nouveaux scénarios à l’étude

Mais les départements ont l’espoir que le temps joue en leur faveur. L’Elysée indique que les annonces du chef de l’Etat ne se feront pas dans l’immédiat. L’exécutif se penche depuis quelques jours sur deux nouveaux scénarios étudiés par M. Cadot. L’un d’eux prévoit le maintien du périmètre actuel du Val-de-Marne, des Hauts-de-Seine et de la Seine-Saint-Denis.

Sauf qu’ils ne seraient plus des départements mais deviendraient des collectivités à statut particulier. Ils remplaceraient les onze établissements publics territoriaux créés en 2016 pour fédérer les 130 communes sur leurs trois territoires. Ce schéma propose la création d’une collectivité du Grand Paris à l’échelle de l’Ile-de-France. Autrement dit la fin de l’actuelle métropole. « Nous pourrions tomber d’accord sur un tel scénario », réagit M Devedjian « Là où il y a métropole, les départements ont vocation à disparaître », expliquait pourtant M. Macron pendant sa campagne présidentielle. En réponse à ce rappel, le patron des Hauts-de-Seine s’empresse de citer Chateaubriand : « On arrive au pouvoir par ce qu’on a de pire, on y reste par ce qu’on a de meilleur », glisse-t-il. Avec l’espoir que M. Macron entende le message.