La folie olympique peine à gagner Séoul. « Il n’y a que les gens de Pyeongchang qui sont excités, non ? », entend-on dans la capitale sud-coréenne. Un soupçon d’ironie qui ferait presque oublier que nombre de Séoulites figurent parmi les milliers de volontaires des Jeux de Pyeongchang.

Le désintérêt est inversement proportionnel aux efforts consentis pour promouvoir l’événement. Ainsi le grand groupe de télécommunications KT diffusait-il, vendredi 9 février, la cérémonie d’ouverture sur la façade de son siège de Séoul, installé sur l’avenue Sejong, théâtre des grands rassemblements des Coréens, située au cœur de la capitale. Mais, de public, point ou si peu.

Le temps était pourtant clément. Après des semaines de neige et les températures négatives d’un hiver exceptionnellement froid, le thermomètre indiquait 4,1 degrés Celsius en plein centre-ville. « Peut-être que les gens regardent la cérémonie chez eux ? », commentait avec un certain fatalisme l’un des employés de KT.

Absence de stars

L’entreprise a beaucoup misé sur cet événement, que les organisateurs ont voulu orienté vers les nouvelles technologies. Elle en a fait le théâtre de la première expérimentation de la diffusion en 5G, avant une mise en service prévue pour 2020. Dans des installations provisoires, souvent réalisées à partir de conteneurs usagés, elle propose des simulations de différents sports, comme le bobsleigh.

Mais ces Jeux, initialement présentés comme un moyen d’« augmenter le prestige » du pays, ont vu leur image affectée par le « Choigate », le scandale ayant conduit à la destitution en mars 2017 de la présidente Park Geun-hye pour corruption et trafic d’influence. L’affaire avait commencé avec des révélations de malversations autour de l’organisation des Jeux.

Autre problème : l’absence de stars des sports d’hiver en Corée du Sud. Si ce n’est dans une certaine mesure les patineurs de short-track, pourvoyeurs de médailles, personne n’a pris la suite de Kim Yuna, qui avait embrasé le cœur des Sud-Coréens avec ses succès en patinage artistique et qui a eu le privilège d’allumer la flamme olympique à Pyeongchang.

Et puis, ces derniers jours, une épidémie de gastro-entérite a éclaté dans la région de Pyeongchang. Le froid polaire, jusqu’à – 20 °C dans la nuit du 6 au 7 février, a forcé les organisateurs à distribuer bonnets, couvertures et autres coussins chauffants pour la cérémonie d’ouverture. Des messages appelant à bien se couvrir ont été diffusés dans le KTX – le TGV local – qui assure la liaison des sites olympiques.

Faire sécher le poisson

La cérémonie d’ouverture se déroulait dans un stade construit dans la zone la plus venteuse et la plus froide de la région, où les habitants avaient l’habitude de faire sécher le poisson en raison justement de ces conditions extrêmes, idéales pour une meilleure conservation.

Le constat fait dans le soir tombant de Séoul confirme les difficultés rencontrées pour vendre des billets. Le 7 février, 826 000 étaient vendus, soit 77,3 % du total disponible. Lee Hee-beom, directeur du comité d’organisation, le Pocog, se voulait pourtant optimiste : « Au rythme actuel, nous devrions avoir des stades pleins dès l’ouverture. »

Pas si sûr car, pour écouler les billets, beaucoup d’entreprises ont été plus ou moins forcées d’en acheter. Une employée d’une de ces entreprises, désireuse de rester anonyme, s’est vu offrir des entrées pour les Jeux comme partie de son augmentation de salaire pour 2017. N’ayant aucun intérêt particulier pour les sports d’hiver, elle n’avait pas prévu de s’y rendre.