Choi Soon-sil, le 16 janvier 2017. / KIM HONG-JI / REUTERS

L’épopée judiciaire de Choi Soon-sil touche à sa fin. La confidente de l’ancienne présidente sud-coréenne Park Geun-hye, Mme Choi a été reconnue, mardi 13 février, coupable d’abus de pouvoir, de corruption et d’ingérence dans les décisions gouvernementales par le tribunal du district central de Séoul. Son avocat, Lee Kyung-jae, a cependant annoncé son intention de faire appel de la peine de vingt ans de prison, dénonçant une « lourde condamnation à la limite de la cruauté ».

Affaires de famille

Fille d’un mystérieux chef religieux, Choi Soon-sil, 61 ans, a été pendant des décennies l’amie et la confidente de Mme Park, à tel point qu’elle avait été surnommée par les médias « Raspoutine ». Bien qu’elle n’eût ni titre ni habilitation de sécurité.

Selon un représentant du parquet, sa position privilégiée a fait d’elle « l’alpha et l’oméga du scandale [de corruption] » qui agite depuis 2016 la Corée du Sud. L’affaire avait entraîné de nombreuses manifestations, puis la destitution et l’inculpation de la présidente Park au début de 2017, notamment pour corruption.

La confidente a notamment tiré profit « de ses liens personnels » anciens avec l’ancienne cheffe de l’Etat pour contraindre de grands groupes à verser des fonds à des fondations sous son contrôle, a relevé le juge Kim Se-yoon. Elle a ainsi accepté 14 milliards de wons (10,5 millions d’euros) de la part de Samsung, le premier conglomérat sud-coréen, et de Lotte, grand groupe spécialisé dans la vente au détail. Coaccusé, le président de Lotte, Shin Dong-bin, a été condamné à deux ans et demi de prison.

La justice sud-coréenne a été plus clémente avec l’héritier de l’empire Samsung, Lee Jae-yong, jugé dans le même scandale. Samsung a déboursé 3,65 milliards de wons (2,8 millions d’euros) pour payer des chevaux et des équipements d’équitation à la fille de Mme Choi. Une somme équivalente a également été versée par Samsung à une société sous le contrôle de Mme Choi. Mais la justice sud-coréenne a estimé qu’il n’existait aucune preuve que Samsung ait demandé en retour des faveurs politiques. Lee Jae-yong a donc été condamné à cinq ans de prison avec sursis et est sorti libre de son procès.

Liens entre élites politiques et économiques

Le scandale avait mis au jour les accointances malsaines entre les élites politiques et économiques. Les chaebols, empires familiaux tentaculaires, sont les moteurs d’une économie sud-coréenne florissante. Des groupes comme Samsung ou Hyundai ont joué un rôle crucial dans le « miracle » économique des années 1960 et 1970 qui a métamorphosé le pays ravagé par la guerre.

Au-delà de son enrichissement personnel, Mme Choi est également soupçonnée d’avoir utilisé ses liens avec l’ancienne présidente pour faire entrer sa fille à la prestigieuse université pour femmes Ewha en 2014, au détriment de candidates plus qualifiées. Vu la gravité des faits de corruption qui sont reprochés à Mme Choi, ce coup de piston pourrait paraître anodin. Mais pas dans une société aussi concurrentielle que la Corée du Sud, où la jeunesse joue sa vie sur un test d’entrée à l’université. Sa fille, qui risquait également des poursuites pour avoir profité de l’argent de Samsung, a été libérée en juin 2016.

Le choigate, l'histoire du gigantesque scandale sud-coréen
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