Essec, campus de Cergy. / CC-BY-SA-3.0

Bonne élève de terminale, ­Camille Perraguin avait le profil pour intégrer une classe préparatoire aux grandes écoles (CPGE), mais n’avait « pas du tout envie de travailler comme une acharnée pendant deux ans », reconnaît la jeune fille. Elle opte alors pour le « bachelor in international business » à Grenoble Ecole de ­management (GEM).

Venus du système scolaire anglo-saxon, depuis une dizaine d’années, les bachelors gagnent les écoles de commerce françaises, y compris les plus prestigieuses (à l’exception d’HEC). Au point que désormais la moindre d’entre elles propose, parallèlement à son programme grande école – accessible après une classe préparatoire –, un diplôme en trois ou quatre ans. Les écoles d’ingénieurs s’y mettent aussi, telle l’emblématique Ecole polytechnique, qui a inauguré cette année sa première promotion de bachelor.

D’abord imaginés pour les étudiants ­internationaux, pour qui le système de prépa et de concours à la française est peu lisible, les bachelors attirent de plus en plus de jeunes Français de bon niveau que l’on avait l’habitude de trouver en classe préparatoire classique.

« Pour les ­lycéens français, ce programme semble plus ­accessible que la CPGE, tout en offrant des perspec­tives intéressantes. »

« Les très bons étudiants qui intègrent notre programme viennent chercher un enseignement plus pratique, une expérience en entreprise et une expatriation avec quatre mois au moins passés à l’étranger, souligne Isabelle Petit, directrice des relations entreprises du ­« bachelor in business administration » d’Audencia Business School. Le bachelor leur offre également la possibilité de ­découvrir de nouvelles disciplines et d’explorer le monde de l’entreprise en sachant qu’ils pourront valider un diplôme au bout de trois ans, quitte à changer de voie après. » Un avis que partage Nancy Locatelli, ­responsable du « bachelor in international business » de GEM : « Pour les ­lycéens français, ce programme, qui ­allie théorie et pratique, semble plus ­accessible que la CPGE, tout en offrant des perspec­tives intéressantes. »

Conséquence, le profil des étudiants de bachelor change. « Non seulement ils sont nettement plus nombreux, mais leur niveau augmente. Nous sommes passés d’une moyenne de 11 au bac à 13,5 », constate Nancy Locatelli. Obligeant certaines écoles à revoir leur programme et à introduire davantage de cours de culture ­générale « de façon à nourrir intellectuellement ces jeunes qui arrivent avec un très bon niveau », note Isabelle Petit.

Vers des masters spécialisés

Une fois leur diplôme en poche, la ­majorité poursuivent leurs études. A Audencia, par exemple, ils sont plus de 70 % à faire ce choix chaque année. Le plus souvent, ils embrayent sur un mastère spécialisé. « Après trois ans de for­mation généraliste, nos diplômés ont une solide culture générale, ils maîtrisent bien les langues étrangères et ont acquis les bases de la gestion et du management (communication, finance, marketing, RH…), ils sont donc prêts pour se spécialiser. Ce que nous leur ­conseillons d’ailleurs de faire », fait ­valoir Isabelle Petit. Un conseil que n’a pas suivi Clara Lheriau, diplômée en novembre 2014 du bachelor d’Audencia. Après son diplôme, elle a préféré intégrer le programme grande école (PGE) en ­apprentissage. « Cela me permettait de poursuivre des études ­relativement généralistes tout en gardant un pied dans l’entreprise. Après avoir goûté à un enseignement pratique tourné vers le monde professionnel en bachelor, j’avais besoin d’être opérationnelle », témoigne la jeune fille.

Quant à Camille Perraguin, elle a toujours souhaité « faire du business » mais, ne voulant pas aller en prépa, elle a mis le cap sur le bachelor de Grenoble – elle l’a décroché en 2017 – en vue de rejoindre un programme grande école à la rentrée dernière. Après un semestre, elle concède avoir trouvé les cours un peu rébarbatifs. « On aborde beaucoup de choses que j’ai déjà vues en bachelor. Mais l’avantage, c’est que je me sens plutôt à l’aise. Et, dès le prochain semestre, je pourrai choisir mes matières », se réjouit-elle.

Insertion aisée sur le marché du travail

Si, pour quelques étudiants, le bachelor est un tremplin pour un programme grande école, c’est loin d’être automa­tique. A ESCP Europe, où ce diplôme a été créé il y a trois ans – « à la demande des campus non parisiens », précise Hélène Louit, directrice du « bachelor in management » –, ce cursus ne débouche pas sur le programme grande école. « Au ­contraire, il a été conçu en vue d’une poursuite d’études dans des masters apportant une spécialisation dans un domaine ou un secteur précis, au sein de l’école ou dans une autre institution, recadre Hélène Louit. Les étudiants sont généralement conscients de l’intérêt d’avoir deux belles marques sur leur CV : celles d’ESCP Europe et d’une autre institution prestigieuse. » Et d’ajouter : « Avec un programme très ­intensif, orienté vers l’international, qui ­regroupe près de 40 nationalités, le bachelor est aussi un tremplin vers de grandes universités à l’international. »

Quant à ceux qui font le choix d’intégrer le marché du travail (entre 30 et 60 %, selon les écoles), ils n’ont aucune difficulté à trouver un emploi. « Ils s’insèrent très facilement. La moitié a déjà un contrat avant même d’avoir soutenu son mémoire », assure Nancy Locatelli.

Découvrez notre dossier spécial sur le bachelor

Le Monde publie, dans son édition datée du jeudi 15 février, un supplément dédié au bachelor, ce cursus de trois années qui séduit les bacheliers pour son enseignement concret, sa proximité avec les entreprises et son incroyable ouverture à l’international. Plus accessible qu’une classe prépa, le bachelor ouvre des perspectives en termes d’insertion professionnelle comme de poursuites d’études. Est-il la prochaine révolution du supérieur ou un miroir aux alouettes ?

Les différents articles du supplément seront progressivement mis en ligne sur Le Monde.fr Campus, dans la rubrique bachelor