Le ministre de l’agriculture Stéphane Travert en compagnie d’Emmanuel Macron lors d’un petit déjeuner au salon de l’agriculture le 24 février. / LUDOVIC MARIN / AFP

Premier salon de l’agriculture pour le président français. Emmanuel Macron, a débuté samedi 24 février sa visite du salon (qui se tient jusqu’au 4 mars, Porte de Versaille à Paris), par une rencontre à huis clos avec les principaux acteurs institutionnels de l’agriculture française. Arrivé avant l’ouverture au public, il devrait ensuite rencontrer les exposants durant la journée.

Pour cette réunion en forme de petit-déjeuner, proposée par l’Elysée, les dirigeants des cinq syndicats représentatifs du secteur sont présents (FNSEA, Jeunes agriculteurs, Confédération paysanne, Coordination rurale, Modef), ainsi que ceux de la Mutualité sociale agricole (MSA, la sécurité sociale du monde agricole), de l’organisme de recherche INRA, de Coop de France et d’autres organismes institutionnels du secteur.

Cette visite a lieu alors que les attentes des agriculteurs sont très fortes. L’année dernière il n’avait arpenté les allées du salon qu’en candidat à la présidence. Emmanuel Macron avait alors proposé de restructurer l’agriculture française autour de ses « filières » pour la sortir de la crise. En recevant cette semaine quelques 700 jeunes agriculteurs à l’Elysée, il a tenté de déminer le terrain de sa réforme et a cherché à enraciner la « révolution culturelle » qu’il dit avoir engagée dans le secteur.

Inquiétude du monde agricole

Avant l’ouverture du salon, la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA), associée aux Jeunes agriculteurs (JA), a organisé, mercredi dernier, une journée de mobilisation et d’action dans plusieurs régions. Le thème retenu : la dénonciation des accords de libre-échange et en particulier celui entre l’Union européenne (UE) et quatre pays du Mercosur (Argentine, Brésil, Uruguay, Paraguay), en cours de négociation.

Globalement le monde agricole s’inquiète de plusieurs réformes :

  • Les éleveurs français, représentés au salon par la vache de race Aubrac « Haute », craignent notamment l’importation à taux réduit en Europe de 70 000 tonnes de viande bovine sud-américaine par an, à droits de douane réduits. Cette importation pourrait selon eux créer une concurrence déloyale de cette viande industrielle produite à très bas coûts et selon des standards sanitaires et de qualité beaucoup moins exigeants qu’en Europe.
  • La révision de la carte des zones agricoles défavorisées, qui va faire sortir 1 380 communes du dispositif ouvrant droit à une indemnité compensatoire de handicap naturel (ICHN).

Les inquiétudes sont d’autant plus importantes qu’en dépit des nombreux rappels à l’ordre du gouvernement à la sortie des Etats généraux de l’alimentation (EGA) - et en attendant en septembre la loi censée leur garantir une meilleure rémunération de leur production - la grande distribution n’a pas joué le jeu dans les négociations commerciales annuelles avec les producteurs, qui s’achèvent pendant le salon. Or, en 2016, près de 40 % des chefs d’exploitation agricoles ont perçu un revenu mensuel négatif ou n’excédant pas 360 euros, selon les dernières statistiques de la MSA, la sécurité sociale agricole, publiées vendredi.

Costumes de rechange

Certaines annonces d’Emmanuel Macron ont tout de même quelque peu rasséréné le monde rural comme la promesse d’une mise en place de « verrous réglementaires » sur les achats de terres agricoles par des étrangers en France.

Avant la visite, l’Elysée a fait savoir que le président se déplaçait toujours avec plusieurs costumes de rechange. L’an passé, il avait reçu un œuf sur l’épaule, dont il avait plaisanté, affirmant que le jet de projectile relevait du folklore du salon. Jeudi il a d’ailleurs pris les devants en soulignant qu’il se « moquait totalement » de l’ambiance dans laquelle il serait reçu Porte de Versailles, concentré qu’il est sur la construction du « visage de la France agricole des prochaines années ».

Vitrine des productions alimentaires françaises sur fonds d’angoisse de l’avenir pour la ruralité, la 55e édition du salon accueille cette année près de 4 000 animaux d’élevage venus de toutes les régions de France.