Des températures très basses, telles celles venues de Sibérie qui touchent la France depuis lundi 26 février, peuvent présenter des risques pour la santé, en particulier pour les personnes souffrant déjà de problèmes respiratoires. Alors que le thermomètre va descendre jusqu’à – 10 oC, Mathilde Pascal, chargée de projets scientifiques à la direction santé environnement de l’agence Santé publique France, rappelle quelques comportements à risque et gestes préventifs.

A partir de quelles températures le corps court-il des risques ?

Mathilde Pascal : Le froid n’a pas besoin d’être très intense pour présenter un risque pour la santé. Il n’y a pas de seuil qui permette de dire « à partir de cette température et en dessous, c’est dangereux », cela ne marche pas comme ça. Les températures que nous avons actuellement ont la particularité d’être très froides, en particulier pour cette période de l’année, avec des températures basses et du vent, qui fait que la sensation de froid est plus importante.

Quels sont les principaux risques liés au froid ? Y a-t-il des comportements à éviter ?

Quand il fait froid, les organismes sont sollicités en réaction. Le froid va amener le corps à mobiliser tous ses systèmes, et notamment le système cardiovasculaire, pour que la température interne reste autour de 37 oC. La chaleur va être concentrée dans les zones les plus importantes du corps : le cœur et le cerveau.

Les mains et les pieds se refroidissent, et il est très important de se couvrir correctement, de mettre des gants et des bonnes chaussures pour éviter les engelures. Il faut aussi se couvrir la tête d’un bonnet pour éviter une perte de chaleur trop importante et que l’organisme s’épuise à lutter pour maintenir la température interne.

Le froid peut provoquer des problèmes en particulier pour les gens qui ont déjà des maladies cardiovasculaires. Il faut éviter de s’exposer et d’avoir une activité physique qui va mobiliser davantage le système cardiovasculaire.

Un risque auquel on pense moins, et qui est associé au froid, c’est l’intoxication au monoxyde de carbone si les gens utilisent un chauffage d’appoint ou complémentaire au gaz dans un espace fermé. Il ne faut pas faire de feu de fortune pour se réchauffer, et il faut ventiler sa maison.

Quelles sont les populations à risque ?

Les populations qui ont des problèmes de santé — principalement des maladies cardiovasculaires — sont fragilisées. Mais il y a aussi des populations qui n’ont pas forcément la sensation de froid, et donc qui ne vont pas s’en protéger correctement, comme les enfants et les personnes âgées — en effet, l’âge altère la sensation de froid.

Il y a aussi toutes les personnes mal protégées du froid, parce qu’elles sont à la rue ou n’ont pas un habitat correctement chauffé.

En quoi le vent aggrave-t-il les effets du froid ?

Comme la température de l’air est plus froide que la température du corps, il se crée juste au-dessus de la peau une petite couche d’air chaud. Le vent vient balayer cette couche, et le corps doit reproduire en permanence de la chaleur au niveau de la peau. La sensation de froid est ainsi plus importante quand il y a du vent, tout comme l’effort fourni par le corps pour se réchauffer. C’est pour cela que le suivi par Météo France est fait sur la température ressentie et pas sur la température absolue.

Une alimentation spécifique est-elle conseillée en période de grand froid ?

Il faut avoir une alimentation normale, équilibrée et suffisante, il n’y a pas de conseils particuliers. En revanche, il faut éviter les boissons alcooliques, qui donnent une fausse sensation : cela réchauffe, mais ensuite cela contracte les vaisseaux sanguins et rend plus sensible au froid. Le sang va bien moins circuler et le corps va moins bien se réchauffer. L’alcool ne réchauffe pas, il refroidit.

Et puis, c’est un peu extrême, mais l’alcool peut faire perdre la capacité d’analyse de la situation. Ainsi, les gens ne vont pas se rendre compte qu’ils ont froid et ne vont pas se protéger.

L’expression « attraper froid » est souvent utilisée. Mais comment tombe-t-on malade ?

En hiver, indépendamment des conditions météorologiques, il y a généralement plus de maladies et de décès. Les gens attribuent souvent cette mortalité au froid. Elle est plutôt due aux épidémies hivernales, notamment aux infections respiratoires.

Il n’empêche que le froid a des effets sur la santé. L’exposition au froid peut favoriser les maladies respiratoires puisque les muqueuses vont être irritées et vont moins bien résister lorsque des organismes pathogènes vont entrer en contact avec elles. D’un autre côté, quand il fait vraiment très froid, les organismes transmettant les maladies ne vont pas forcément survivre.