A Washington DC, en août 2010. / TIM SLOAN / AFP

Les femmes tombent moins enceintes ? Gare à la récession qui s’annonce ! Ainsi peut être sommairement résumée la conclusion d’une étude publiée lundi 26 février, aux Etats-Unis, par le National Bureau of Economic Research (NBER).

On savait déjà que les projets de bébé ne font pas bon ménage avec la crise et le chômage. Les économistes Kasey Buckles, Daniel Hungerman et Steven Lugauer vont plus loin en affirmant qu’aux Etats-Unis la fertilité peut servir d’indicateur avancé du cycle économique. Concrètement, leurs travaux démontrent que les trois dernières récessions américaines ont été précédées par une baisse des conceptions. Un déclin amorcé plusieurs trimestres avant que l’économie se contracte.

Les trois derniers épisodes de contraction aux Etats-Unis ont été précédés d’une baisse des conceptions

L’étude se fonde sur un échantillon de plus de 100 millions de naissances intervenues entre 1988 et 2015. Elle se concentre particulièrement sur l’épisode de la « grande récession » qui a suivi la crise financière, il y a une décennie. A l’automne 2007, rappellent les auteurs, les marchés sont au plus haut. Dans les sondages, les dirigeants d’entreprise font état d’un optimisme prudent. Mais, en décembre, l’économie américaine entre officiellement en récession.

Le rythme des conceptions a commencé, lui, à fléchir des mois plus tôt, dès le milieu de l’année. Bien avant la faillite de la banque américaine Bear Stearns (mars 2008), sans même parler de celle de Lehman Brothers (septembre 2008). L’effondrement des naissances ne fait que s’amplifier avec la crise et se poursuit quelque temps au-delà. Au point d’engendrer une « reprise sans bébés », fait remarquer l’étude.

La décision d’enfanter corrélée à l’optimisme vis-à-vis du futur

Le même schéma est établi lors des deux précédents épisodes de contraction, en 1990 et en 2001. Les couples américains seraient-ils pourvus d’un don divinatoire ? Evidemment non, soulignent les auteurs.

En réalité, les germes des trois récessions étaient déjà semés avant qu’elles se déclenchent et « ces facteurs semblent avoir impacté les projets de grossesse avant d’affecter de larges pans de l’économie ». La décision d’enfanter est généralement corrélée à un certain degré d’optimisme vis-à-vis du futur proche.

En résumé, les trois économistes concluent que la chute de la fertilité permet de prédire aussi bien, sinon mieux, l’avènement d’un choc économique majeur que certains thermomètres traditionnels, tels l’indice de confiance des consommateurs ou les prix de l’immobilier.

Pour autant, la comptabilité des femmes enceintes ne serait pas le premier indicateur saugrenu à figurer au catalogue utilisé par les chercheurs pour prendre le pouls de l’économie. Alan Greenspan, l’ancien président de la Réserve fédérale américaine, la banque centrale des Etats-Unis, recommandait ainsi de surveiller les ventes de sous-vêtements masculins : anticipant des crises, les hommes achèteraient moins de slips, jugeant la dépense superflue…