La mère de Salah Hamouri, en 2011 à Jérusalem. / AHMAD GHARABLI / AFP

Le Franco-Palestinien Salah Hamouri, qui devait sortir de sa prison du Néguev, dans le sud d’Israël, le 28 février, demeurera pour l’heure derrière les barreaux. Une demande de prolongement de sa détention administrative de quatre mois, signée du ministre de la défense israélien, Avigdor Lieberman, devait être examinée par un juge de district de Jérusalem, jeudi 1er mars.

A l’ouverture de la session, Salah Hamouri a cependant avisé le juge qu’il entendait « boycotter le tribunal », pour dénoncer sa détention « illégale », et qu’il refusait ainsi d’être défendu par son avocat, Mahmoud Hassan. L’audience, une simple formalité, a été reportée au lundi 5 mars, mais son issue ne fait guère de doute : la détention de M. Hamouri devrait être effectivement prolongée.

M. Hamouri, né de mère française et de père palestinien, avait été arrêté le 23 août 2017 à son domicile de Jérusalem-Est par les forces de l’ordre israéliennes. Incarcéré sans inculpation ni réel procès, il a passé la majeure partie de sa peine de six mois dans sa prison Néguev. Sous détention administrative, sa peine peut être renouvelée indéfiniment.

« Activités dangereuses »

Ayant fréquemment recours à ce type d’incarcération, qu’autorise une loi héritée du mandat britannique, Israël invoque des raisons de sécurité pour garder secrètes les possibles informations retenues contre les accusés, qui sont presque toujours palestiniens. Selon l’avocat de Salah Hamouri, qui n’a pas accès au dossier de son client, les autorités israéliennes soupçonnent le jeune homme d’être impliqué dans « des activités en Cisjordanie » jugées « dangereuses pour la sécurité de la région ».

Salah Hamouri avait déjà passé trois ans en détention administrative, entre 2005 et 2008, avant d’être condamné par un tribunal militaire israélien pour « complot et appartenance aux jeunesses du Front populaire de libération de la Palestine [FPLP] », un groupuscule palestinien de gauche, qu’Israël considère comme une organisation terroriste. Il avait alors accepté de plaider coupable pour réduire de moitié sa peine, de quatorze à sept ans. Finalement, il avait été libéré en décembre 2011, avec un millier d’autres prisonniers palestiniens, en échange du soldat franco-israélien Gilad Shalit, capturé en 2006 par un commando palestinien au sud de la bande de Gaza.

Le jeune Hamouri a cependant toujours clamé son innocence. A sa sortie de prison, après avoir repris ses études de droit, il était devenu enquêteur de terrain pour l’association Addameer, qui défend les droits des prisonniers palestiniens. Trois jours avant son interpellation en août 2017, il avait passé l’examen du barreau palestinien.

Dans la société palestinienne, son cas n’est pas isolé. Sur les 6 119 Palestiniens enregistrés comme prisonniers politiques en Israël, 450 sont en détention administrative, rapporte Addameer. « Là-bas, Salah est un parmi tous les autres. En revanche, il le seul prisonnier franco-palestinien », rappelle Elsa Lefort, son épouse, interdite d’entrer sur le territoire israélien depuis janvier 2016.

« Israël cherche à le faire partir »

Résidant en France avec leur fils, elle continue de mobiliser la société civile, et d’interpeller les autorités françaises pour que celles-ci obtiennent d’Israël la libération de son mari, citoyen français, et revendique leurs droits en matière de regroupement familial.

A plusieurs reprises, le Quai d’Orsay a fait part de sa « préoccupation » quant à l’incarcération de M. Hamouri, affirmant « espérer sa libération rapide ». Une demande de ce type aurait été exprimée par le président Emmanuel Macron, lors de sa rencontre avec le premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, le 10 décembre 2017 à Paris. Jusqu’alors, aucune réponse n’aurait été formulée par Israël.

Or, « seule une intervention politique pourra mettre fin à cette détention arbitraire, puisque la décision initiale est politique », insiste Elsa Lefort. Son avocat, Mahmoud Hassan, estime, comme d’autres proches de M. Hamouri, que le jeune homme dispose cependant d’une porte de sortie : « Israël cherche à le faire partir » du pays, dit-il, pour le destituer en son absence de son statut de résident palestinien de Jérusalem, et lui interdire ensuite l’entrée sur le territoire israélien.

En renouvelant sa détention administrative, les autorités israéliennes chercheraient ainsi à « faire pression » sur le jeune Franco-Palestinien pour qu’il « cède » et rejoigne sa femme et son fils en France, selon M. Hassan. A moins que Salah Hamouri ne décide de rester pour « se battre seul ici ».