C’est le premier gros coup de l’Allemand Thomas Buberl, un an et demi après sa prise de fonctions à la tête d’Axa, en septembre 2016. Le successeur d’Henri de Castries, qui veut accélérer la transformation du numéro deux mondial de l’assurance, derrière Allianz, va mettre sur la table 15,3 milliards de dollars (12,4 milliards d’euros) pour racheter le groupe XL, spécialiste de l’assurance dommages des entreprises.

Un accord a été annoncé lundi 5 mars au matin, pour l’acquisition de 100 % de l’assureur domicilié aux Bermudes, mais présent en Amérique du Nord, en Europe, sur le marché du Lloyd’s et dans la région Asie-Pacifique. La finalisation de la transaction « devrait avoir lieu au second semestre 2018 », a annoncé le français dans un communiqué. La transaction a été accueillie fraîchement par les marchés, le titre de l’assureur français Axa reculant de plus de 5 % lundi matin à la Bourse de Paris.

« Une opportunité unique »

Avec cette opération géante, le profil d’Axa va profondément évoluer. Comme il l’avait annoncé dès mai 2016, Axa va introduire en Bourse à New York au deuxième trimestre 2018 une première tranche de ses activités d’assurance vie aux Etats-Unis. Puis il s’en délestera totalement, par ventes successives au cours des prochaines années. Et dans un même mouvement, en rachetant le Groupe XL, le groupe français met la main sur un des leaders mondiaux de l’assurance dommages des entreprises et de spécialités (risques spatiaux, couverture des œuvres d’art…), qui réalise 35 % de son activité aux Etats-Unis.

Comme l’a indiqué Thomas Buberl, il s’agit là d’« une opportunité stratégique unique qui permet à AXA de faire évoluer son profil d’activité d’une entreprise majoritairement présente sur la vie, épargne, retraite vers un acteur dont l’assurance dommages devient le métier principal ». Si AXA réalise 39 % de son résultat dans l’assurance dommages, cette part passera à 50 %, en acquérant XL et en sortant de son activité d’assurance vie aux Etats-Unis.

Une fois l’opération bouclée, l’assurance dommages deviendra la principale activité d’Axa. Le Français entend parallèlement muscler son activité en santé. Avec cette transaction, Axa « va devenir le numéro 1 mondial de l’assurance dommages des entreprises en termes de primes », a poursuivi le directeur général du groupe, soulignant que le profil de risque de son groupe « sera fortement rééquilibré vers les risques assurantiels, avec une plus faible exposition aux risques financiers ».

« Un acteur en croissance »

L’opération sera réglée en numéraire. En vertu de l’accord de fusion, les actionnaires de XL Group recevront 57,60 dollars par action. « Nous allons la financer avec les 3,5 milliards d’euros de cash dont nous disposons, les 6 milliards que nous attendons de l’introduction en Bourse de nos activités vie et de restructurations aux Etats-Unis, et avec une émission de dette supplémentaire pour 3 milliards », détaille Gérald Harlin, le directeur financier du groupe Axa.

Ce montant total de 12,4 milliards d’euros représente une prime de 33 % par rapport au prix de clôture de l’action du Groupe XL, en date du 2 mars 2018. L’assureur était, selon l’agence Bloomberg, convoité par plusieurs autres concurrents, dont l’allemand Allianz.

Pourquoi ? L’assureur basé aux Bermudes a certes enregistré une perte nette de 560 millions de dollars en 2017, en raison du coût des catastrophes naturelles, mais il s’agit d’un « acteur en croissance », « très agile », selon les termes d’Axa. Il a engrangé 15 milliards de dollars de primes en 2017, dont environ 5 milliards de dollars de primes en réassurance. Fondé en 1986, le Groupe XL, aujourd’hui coté à Wall Street, affiche une capitalisation boursière d’environ 11 milliards de dollars et emploie près de 7 400 personnes.

Complémentarités à venir

AXA mise sur les complémentarités à venir. « Nous sommes surtout positionnés sur les petites et moyennes entreprises, alors qu’XL est fort sur le segment des entreprises moyennes et grandes », souligne M. Harlin. XL va également compléter et diversifier le portefeuille d’Axa dans la réassurance. L’opération devrait engendrer au total des synergies d’environ 400 millions de dollars avant impôts chaque année pour Axa.

Côté gouvernance, les opérations de XL Group, ainsi que celles d’Axa spécialisées dans l’assurance dommages des grandes entreprises, de spécialités et des œuvres d’art (Axa Art) seront réunies et dirigées par Greg Henrick, actuellement président des activités dommages du Groupe XL.

Ce rachat signe le retour des grandes opérations de fusions et acquisitions dans le secteur de l’assurance, du moins pour Axa, qui n’avait pas engagé de tels montants depuis la crise financière de 2008. En 2006, le groupe français avait racheté l’assureur suisse Winterthur, pour 8,9 milliards d’euros. « Le but n’est pas de faire une opération géante, ce n’est pas la croissance pour la croissance, notre objectif est d’avoir une stratégie claire », relativise Gérald Harlin.