Les collectifs féministes à l’origine d’une pétition contre la tenue d’un concert de Bertrand Cantat poursuivent leur mobilisation. Dans une lettre ouverte, publiée le 5 mars, ils interpellent plusieurs responsables politiques, dont la ministre de la culture, Françoise Nyssen, et les partenaires du festival Papillons de nuit, à Saint-Laurent-de-Cuves, dans la Manche, afin de faire annuler la prestation du chanteur, le 18 mai.

« Artiste français, il est devenu le symbole des violences conjugales le 1er août 2003 lorsqu’il a, de ses mains, tué sa compagne Marie Trintignant [...], écrivent-ils. Cessons de promouvoir lors d’événements publics, financés notamment par des deniers publics, des hommes qui se sont rendus coupables de féminicides et de violences extrêmes sur des femmes ; des hommes qui, sans oser affronter l’ignominie et l’irréparable, se présentent encore trop souvent en victimes. »

« En tant que partenaire de ce festival vous participez à son financement, lui apportez une caution politique, morale et institutionnelle, vous y associez votre image et légitimez, de fait, les messages diffusés dans ce cadre », poursuit le texte, qui demande aux responsables politiques de se « positionner » et de se « désolidariser de cette entreprise ».

70 000 signatures recueillies

Une pétition, qui a recueilli plus de 70 000 signatures, n’avait pas convaincu les organisateurs du festival d’annuler le concert. « Nous affirmons le maintien de tous nos concerts. Nous faisons valoir le droit de nos trente-huit artistes à monter sur scène et le droit de notre public à se forger sa propre opinion sur leurs qualités humaines et artistiques », ont déclaré ces derniers.

Les collectifs féministes s’en émeuvent. « Il·elle·s [les organisateurs] considèrent que leur seul critère de choix doit être celui de l’artistique. Or, s’il·elle·s programment un « artiste qui a écrit une page de l’histoire du rock français », il·elle·s programment aussi un homme qui a écrit une page de l’histoire des violences faites aux femmes. Pouvons-nous considérer qu’il ne s’agit que d’un détail de sa biographie ? »

Quinze ans après la mort de l’actrice Marie Trintignant sous les coups du chanteur, Bertrand Cantat a entamé jeudi dernier sa tournée dans un contexte rendu plus explosif encore par l’affaire Weinstein et par la vague de dénonciation du harcèlement et des violences envers les femmes qu’elle a suscitée.

Cependant, aucun rassemblement n’avait été organisé pour s’opposer à la venue du chanteur, dont la participation à des festivals dans les mois à venir suscite par endroits la polémique. Au total, une quarantaine de dates et de participations à des festivals sont programmées d’ici à l’été dans le cadre de la tournée de l’ex-leader de Noir Désir.

A ce jour, un seul concert a été annulé, celui prévu à la fin de juillet au festival Les Escales, à Saint-Nazaire (Loire-Atlantique), dont le maire (PS), David Samzun, avait exprimé sa « désapprobation » dans une lettre aux organisateurs.