Depuis le 15 janvier, l’action de Snapchat a chuté de 10 % / Drew Angerer / AFP

Nouvelle vague de licenciements chez Snap, la quatrième en six mois. Jeudi 8 mars, la maison-mère de l’application de messagerie instantanée Snapchat a confirmé la suppression de plus de 120 postes d’ingénieurs informatiques, soit environ 4 % de ses effectifs. Chahutée à Wall Street depuis ses débuts boursiers en mars 2017, la société cherche à contenir la hausse de ses dépenses. Selon le site spécialisé The Information, elle ambitionne même de devenir rentable dès cette année.

Les licenciements d’ingénieurs sont très rares dans les entreprises high-tech américaines cotées en Bourse. La direction de Snap assure cependant que sa décision n’est pas motivée par les finances, mais par la volonté de restructurer son organisation pour la rendre plus efficace. « Nous souhaitons débrider la vitesse et la productivité », assure Jerry Hunter, le responsable de l’ingénierie, dans un message adressé aux salariés. Il espère également corriger « les carences technologiques accumulées ces dernières années », peut-être une référence à l’application Android, toujours à la traîne.

Colère des usagers

Cette annonce intervient alors que Snapchat vient de lancer le déploiement d’une nouvelle version. Celle-ci sépare les contenus partagés par les amis et ceux postés par la communauté et les médias partenaires. Elle introduit aussi un algorithme informatique pour déterminer l’ordre d’affichage. Ces changements ont suscité la colère de nombreux utilisateurs. Sur l’AppStore d’Apple, la note de l’application ne s’élève qu’à 1,8 sur 5.

Par ailleurs, une pétition en ligne totalisant plus de 1,2 million de signatures, réclame le retour au précédent design. Et plusieurs célébrités, comme la star de la télé-réalité Kylie Jenner, ont exprimé leur mécontentement. Fidèle à ses habitudes, la société n’a pas testé cette refonte auprès d’un petit groupe d’utilisateurs comme le font ses rivaux, reconnaît-on en interne. De quoi susciter l’inquiétude des investisseurs redoutant une baisse de l’activité et des recettes publicitaires. Depuis le 15 janvier, l’action a chuté de 10 %.

Les précédents plans sociaux avaient été plus modestes, ne concernant chacun qu’une vingtaine de salariés. Ils avaient touché les équipes de recrutement, la branche responsable des contenus pour la rubrique Discover et la division chargée des Spectacles, des lunettes de soleil dotées d’une caméra dont les ventes décevantes se sont traduites par une charge de 40 millions de dollars (32,5 millions d’euros). En 2017, M. Spiegel avait prévenu que le rythme des embauches allait ralentir en 2018. Et il avait annoncé des « choix difficiles ».

Un moyen de maintenir la pression

D’après Bloomberg, Snap aurait notamment décidé de ne pas verser de bonus en 2017, expliquant que les objectifs annuels n’avaient pas été atteints. Connue pour ses méthodes de managements brutales, l’entreprise s’est aussi dotée d’un nouveau système de notation de ses employés. Un moyen de maintenir la pression : les 120 personnes licenciées faisaient partie des moins bien classées.

Après une année difficile en Bourse, Snap a publié début février des résultats financiers jugés encourageants par les marchés. Son chiffre d’affaires a progressé plus fortement que prévu au quatrième trimestre 2017. Sa perte nette a été moins importante que redouté. Son application a également attiré neuf millions de nouveaux utilisateurs, la meilleure performance en près de deux ans.

Mais devenir rentable dès 2018 est un objectif ambitieux, si ce n’est impossible à atteindre. L’an passé, la société de Venice Beach a en effet accusé une perte nette de 1,4 milliard de dollars (1,1 milliard d’euros), sans tenir compte des 2 milliards de dollars liés à l’enregistrement dans les comptes, au moment de l’introduction en Bourse, des actions versés ces dernières années aux salariés.

En 2017, les dépenses de Snap ont augmenté à un rythme plus élevé que son chiffre d’affaires. Et elles ont été trois fois supérieures aux recettes. En moyenne, les analystes anticipent un déficit de 600 millions de dollars pour 2018. Ils n’attendent pas la rentabilité avant 2021. Au mieux.