Publicité anti-IVG à Budapest, en Hongrie, en 2011: « Avortement, les croisés contre-attaquent », d’Alexandra Jousset et Andrea Rawlins-Gaston. Sur Artetv / BEA KALLOS / AFP

LES CHOIX DE LA MATINALE

Le regard de quatre femmes sur les quartiers en Seine-Saint-Denis dont elles sont originaires, une enquête sur les mouvements anti-avortement en Europe et un documentaire sur le tabou de la sexualité à Hollywood. Voici notre sélection hebdomadaire de replays.

« Le Parcours des combattantes »

Tishou, Laëtitia, Sylvie et Nadia ont grandi dans des cités en Seine-Saint-Denis. Ces filles du « 9-3 » ont eu à se battre dans un environnement violent et dominé par les hommes. Vingt ans ont passé. Elles sont aujourd’hui chorégraphe, écrivaine, réalisatrice et militantes. Et elles sont revenues au pied des immeubles où elles ont passé leur jeunesse pour raconter leur parcours à Olivier Delacroix.

Le documentariste et animateur possède une réelle qualité d’écoute et d’attention aux autres. Il l’exerce, ici, avec quatre personnes de caractère qui ont parfois été poussées à cacher leur féminité sous des vêtements et des attitudes masculines. Et qui, bien que vivant désormais dans Paris ou dans des communes voisines plus calmes, n’ont au fond jamais vraiment quitté le quartier de leur enfance.

Mais l’atmosphère d’entraide et de solidarité qu’elles ont connue malgré la pauvreté, a laissé la place au repli sur soi et à un islamisme radical dont s’inquiète Nadia. « Je ne veux pas que nos enfants nous demandent plus tard : qu’avez-vous fait pour nous protéger ? », confie la jeune femme qui a fondé l’association la Brigade des mères pour lutter contre la radicalisation des jeunes. Son témoignage, comme ceux de Tishou, de Laëtitia et de Sylvie, résonne comme un message d’espoir. Louis Berthelot

« Le Parcours des combattantes », d’Olivier Delacroix et Katia Maksym (France, 2018, 73 min). Sur France.tv

« Avortement, les croisés contre-attaquent »

Avortement, les croisés contre-attaquent - ARTE
Durée : 01:36:00

« Les anti-avortement sont repartis en guerre », prévient la voix off. En Europe, en effet, une nouvelle génération de militants remet en cause le droit à l’interruption volontaire de grossesse (IVG). Certains mouvements sont influencés par les milieux ultraconservateurs américains, d’autres potentiellement financés par des oligarques russes. C’est pourquoi Alexandra Jousset et Andrea Rawlins-Gaston ont tenu à mener leur travail d’investigation jusqu’en Russie et aux Etats-Unis.

Les deux auteures dressent ainsi le portrait des nouveaux chefs de file de ces groupes anti-avortement, ­rompus à l’exercice de la communication 3.0. Parmi eux, en France : Emile Duport, porte-parole des Survivants, qui planifie des cyberactions coup de poing pour faire parler de son mouvement dans les ­médias. ­

La lutte anti-IVG s’envisage aussi sur le terrain politique. En Europe, ses militants parviennent à faire entendre leur voix auprès des gouvernements et sont de plus en plus influents à Bruxelles. Leur cible : les fonds de l’Union européenne destinés à financer la contraception et l’avortement dans les pays en voie de développement. En 2013, la pétition « One of us », en faveur de la protection de l’embryon, avait obtenu plus de 1,7 million de signatures sur le Net, du jamais-vu. Preuves à l’appui, ce documentaire met au jour une « guerre » menée de front par-delà les frontières, dans l’arène médiatique et en souterrain à travers un important réseau d’individus qui « avancent masqués ». Camille Langlade

« Avortement, les croisés contre-attaquent », d’Alexandra Jousset et Andrea Rawlins-Gaston (France, 2017, 95 min). Sur Artetv

« Hollywood : pas de sexe s’il vous plaît »

Bande annonce de Hollywood, pas de sexe s'il vous plaît
Durée : 01:02

Comme le souligne l’historien Craig Detweiler, « les Américains ont toujours été plus à l’aise avec la violence qu’avec le sexe ». Dans le documentaire de Clara et Julia Kuperberg, l’évidence saute aux yeux lorsqu’il s’agit d’aborder ces relations complexes à travers le cinéma. Aux Etats-Unis, il est plus facile de parler de sexe que de le montrer.

Même si, au cours des années 1970, certains films comme Gorge profonde, Le Lauréat ou Macadam Cowboy marquent les esprits en montrant des femmes assumant une sexualité sans tabou ou décrivant des situations peu en phase avec le puritanisme local, la morale freine les ardeurs. « Je pense que les hommes américains sont gênés d’être assis à côté de leur épouse et d’être excités par une scène explicitement sexuelle au cinéma », ­estime le réalisateur britannique Adrien Lyne, auteur notamment de 9 semaines 1/2, projeté aux Etats-Unis dans une version édulcorée, les scènes sadomasochistes de la version originale ayant disparu.

En 1992, le célèbre Basic Instinct, avec son héroïne (interprétée par Sharon Stone) bisexuelle et ses scènes de sexe et de violence, sortira lui aussi en deux versions, celle destinée aux Etats-Unis étant évidemment plus soft. Paradoxalement, la télé se montre, à travers de nombreuses séries, très audacieuse en matière de sexe. Puritaine, l’Amérique ? Hypocrite avant tout. Alain Constant

« Hollywood : pas de sexe s’il vous plaît », de Clara et Julia Kuperberg (Etats-Unis, 2017, 60 min). Sur OCS en streaming.