Le premier ministre palestinien, Rami Hamdallah (au centre), en visite sur un site situé au nord de la bande de Gaza, peu après la bombe artisanale qui a touché son convoi, le 13 mars. / Adel Hana / AP

Un nuage de fumée sombre s’élève à l’horizon, des passants toussent, des policiers courent dans un accès de panique vers le lieu de l’explosion : une bombe artisanale a visé le convoi du premier ministre palestinien Rami Hamdallah, mardi 13 mars, alors qu’il venait de pénétrer dans la bande de Gaza, par le point de passage d’Erez. Plusieurs personnes ont été légèrement blessées dans cet attentat, mais le dirigeant, indemne, a poursuivi sa visite pendant deux heures, avant de retourner en Cisjordanie.

Le cabinet du président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, a condamné cet acte « lâche ». « Quels que soient les auteurs, ils servent directement les intérêts de l’occupation israélienne, le principal bénéficiaire de la division » entre factions, explique un communiqué. Le chef des services de sécurité palestiniens, Majed Faraj, l’un des plus proches collaborateurs du « raïs », se trouvait aussi dans le convoi. « Il est trop tôt pour accuser quiconque », a-t-il dit.

L’Autorité palestinienne tient le Hamas pour responsable de la sécurité sur le terrain. De son côté, le mouvement islamiste armé, qui contrôle la bande de Gaza depuis 2007, a publié un communiqué dans lequel il nie toute implication et dénonce l’attaque. Celle-ci s’inscrirait dans « les tentatives visant à déstabiliser la sécurité dans la bande de Gaza, ainsi que les tentatives pour compromettre les efforts actuels en vue de parvenir à l’unité nationale et à la réconciliation intérieure », dit son communiqué. Le Hamas fait ainsi référence au processus politique engagé depuis octobre 2017, à l’instigation de l’Egypte, pour surmonter les divisions entre factions et permettre à l’AP de reprendre le contrôle de la bande de Gaza. Ce processus laborieux se heurte pour l’instant à des écueils administratifs mais surtout à une défiance mutuelle profondément enracinée.

Le plus grave incident depuis cinq mois à Gaza

« Nous ne laisserons personne détruire le projet national palestinien », a déclaré Rami Hamdallah. Le premier ministre a assuré que l’AP comptait poursuivre ses efforts en vue de la réconciliation. « J’appelle le Hamas et les autres factions à participer au Conseil national palestinien qui sera réuni en avril, parce qu’il s’agit d’une phase critique pour le peuple palestinien », a-t-il ajouté. Malgré son stoïcisme et ces propos volontaristes, cet épisode est le plus grave incident survenu depuis cinq mois à Gaza.

Il risque d’accentuer les tensions entre factions et la méfiance de Mahmoud Abbas envers ce territoire palestinien qui lui échappe. Quant aux auteurs possibles de l’attaque, l’une des pistes fréquemment citées conduit vers l’un des groupuscules salafistes implantés dans le territoire palestinien. Depuis début janvier, une phase de confrontation inédite a débuté entre le Hamas et les djihadistes éparpillés dans le Sinaï égyptien, affiliés à l’organisation Etat islamique (EI). Dès le début d’après-midi, le Hamas confirmait que des arrestations avaient eu lieu.

Lors de sa visite à Gaza, M. Hamdallah a notamment participé à l’inauguration d’une infrastructure promise depuis treize ans : la station d’épuration Ngest, qui traitera à terme les eaux usées rejetées par 360 000 personnes vivant dans le nord de l’enclave. D’un coût total de 73 millions de dollars (59 millions d’euros), dont 19,2 pris en charge par l’Agence française de développement (AFD), ce dispositif ambitieux a été longtemps retardé par les obstacles dans l’importation des équipements et des matériaux créés par les Israéliens. Il est constitué de stations de pompage, d’une station de traitement de ces eaux usées et de neuf nouveaux bassins d’infiltration. Une très rare bonne nouvelle à Gaza.