Dans la partie kényane de la ville de Moyale, qui s’étend de part et d’autre de la frontière avec l’Ethiopie, en juillet 2008. / Antony Njuguna / REUTERS

Près de 5 000 personnes se sont réfugiées du côté kényan de la ville frontalière de Moyale après avoir fui la partie éthiopienne, où neuf civils ont été tués pendant le week-end des 10 et 11 mars par des soldats éthiopiens dans des circonstances controversées, a annoncé mardi 13 mars la Croix-Rouge kényane. « Environ 5 000 réfugiés sont arrivés à Moyale, la majorité étant des femmes et des enfants », indique l’organisation dans un communiqué.

Selon un habitant de la ville, qui a requis l’anonymat, l’armée éthiopienne recherche des membres du Front de libération oromo (OLF), un groupe rebelle. « Il y a une agression et un harcèlement continu qui suscite la peur et force les gens à fuir », a-t-il déclaré à l’AFP.

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L’agence officielle ENA avait rapporté dimanche 11 mars que des soldats avaient tué neuf civils près de la ville frontalière, après les avoir pris par erreur pour des membres de l’OLF. Mais deux résidents de Moyale, parlant lundi à l’AFP sous couvert de l’anonymat par crainte de représailles, ont contesté cette version.

« Ils ont commencé à tuer tout ce qui bougeait »

Selon l’un d’eux, qui s’est enfui de l’autre côté de la frontière, la tuerie a eu lieu samedi quand un attroupement s’est formé autour de deux motocyclistes qui s’étaient heurtés et avaient commencé à se quereller. « Un véhicule militaire est arrivé. Les soldats en sont sortis et ont commencé à tirer de toutes parts et à tuer tout ce qui bougeait. »

La fusillade s’est produite, selon ces résidents, dans un quartier réputé pour son opposition au gouvernement éthiopien, alors que les relations entre la population et les soldats déployés à Moyale s’étaient tendues après la déclaration de l’état d’urgence. Cette mesure, qui interdit notamment toute manifestation, a été prise le 16 février, au lendemain de la démission du premier ministre Hailemariam Desalegn.

Moyale est située en région Oromia (dans le sud et l’ouest du pays), berceau de la communauté oromo, la plus importante d’Ethiopie, et épicentre d’un mouvement de protestation ayant débuté fin 2015, puis s’étant étendu en 2016 à d’autres régions, dont celle des Amhara (nord). Sa répression a fait au moins 940 morts.