Lucas Hernandez le 5 septembre 2017 sous le maillot des Espoirs face au Kazakhstan. / JEAN-FRANCOIS MONIER / AFP

Le choix cornélien de Lucas Hernandez, né à Marseille, mais qui a grandi en Espagne, vient-il d’être définitivement tranché par Didier Deschamps ? A 22 ans, le défenseur de l’Atlético de Madrid, international espoir français à neuf reprises, était tiraillé depuis plusieurs mois entre les Bleus et la Roja. Quel maillot allait revêtir ce défenseur central de formation, aligné parfois au poste de latéral gauche par son entraîneur, Diego Simeone ?

Il semble que le fils de l’ancien footballeur Jean-François Hernandez (Toulouse, OM ou Atlético) ait donné sa préférence au premier qui l’a appelé. Lucas Hernandez figure en effet dans la liste des 24 joueurs qui disputeront deux matchs amicaux de l’équipe de France face à la Colombie et à la Russie (23 et 27 mars).

Il y a seulement deux semaines, lors d’un entretien à la chaîne espagnole RTVE, la tendance était complètement différente. « L’Espagne m’a tout donné, et je serais ravi d’obtenir la nationalité du pays, car je me considère plus espagnol que français. Qu’est-ce que je peux te dire ? Je parle mieux espagnol que français. Ça veut tout dire… », déclarait le jeune homme. A la mi-janvier, il avait avoué avoir entrepris des démarches pour bénéficier d’un passeport de son pays d’adoption, répondant par là même aux appels du sélectionneur espagnol Julen Lopetegui : « Comme vous le savez, je suis Français et j’ai un passeport français. Mais bon, on est en train de regarder, c’est entre les mains des avocats, et il faut rester tranquille. »

Ces atermoiements et ces signaux contradictoires ont de quoi surprendre et même rendre dubitative la presse ibérique, à l’image de la question d’un journaliste espagnol à Didier Deschamps, lui demandant s’il n’avait pas peur que Hernandez ne réponde pas à la convocation. « Vous inquiétez pas, il est très content de venir avec nous, je peux vous l’assurer », a répliqué, taquin, le Bayonnais.

A son poste de prédilection, dans l’axe de la défense, la concurrence lui ôte tout espoir : Varane, Umtiti, Kimpembe ou encore Koscielny. Le sélectionneur souhaite l’utiliser à gauche. La méforme du Parisien Layvin Kurzawa n’y est pas étrangère. « Je le prends pour être latéral gauche, en Espoirs il joue à ce poste-là aussi, il joue autant défenseur central que latéral, voire plus latéral, avec l’Atlético Madrid. C’est un jeune joueur, mais qui est déjà habitué aux compétitions internationales, il n’arrive pas là par hasard. Il est très content de jouer avec nous. »

Bis repetita avec Théo Hernandez ?

Mais, même à ce poste, Lucas Digne part titulaire, et le convalescent Benjamin Mendy, qui est en phase de reprise avec Manchester City, devrait être en Russie si tout se passe bien. On peut donc légitimement se demander si Deschamps n’a pas sélectionné le Colchonero pour couper l’herbe sous le pied de l’Espagne. Le capitaine des champions du monde 1998 se défend bien entendu de toute manœuvre mesquine : « Je ne prends jamais un joueur pour l’empêcher de choisir une autre sélection. Quand je fais la démarche, c’est parce que je pense que c’est le moment pour que ce soit valable pour Lucas, comme ça a été le cas pour d’autres joueurs. »

Un argument de poids peut inciter à se fier à la sincérité de Didier Deschamps. Seules les rencontres officielles fixent une fois pour toutes la nationalité sportive d’un footballeur. « Après, vous connaissez le règlement, ce ne sont pas les matches amicaux qui permettent de bloquer le joueur », a ainsi plaidé justement le technicien. On imagine mal quand même Lucas Hernandez répondre à cette convocation avec les Bleus et finalement opter pour le maillot de la Roja quelques semaines, ou mois, plus tard.

La fratrie Hernandez offre un autre cas d’espèce. Le jeune frère de Lucas, Théo Hernandez, qui a quitté l’Atlético cet été pour rejoindre le rival, le Real, pourrait, quant à lui, opter pour la sélection espagnole. En mai 2017, il ne s’était pas présenté à un rassemblement des Espoirs tricolores.

De par son parcours, Lucas Hernandez sera soumis à une pression particulière en équipe de France. Son comportement, même le plus anodin, commence déjà à être épié. Alors qu’il a publié un tweet, certainement préenregistré, pour encourager son club avant le huitième de finale retour de Ligue Europa prévu ce soir, des commentaires de supporteurs français lui reprochent de n’avoir pas salué à la place sa première sélection avec les Bleus. Sur le terrain comme en dehors, Lucas Hernandez n’a plus le droit à l’erreur.