Emmanuel Macron visite un centre d’apprentissage, à Tours, mercredi 14  mars. / BENOIT TESSIER / AFP

Confronté à la grogne des territoires ruraux qui lui reprochent d’être le « président des villes » et à une baisse sensible de sa popularité dans les études d’opinion, Emmanuel Macron a décidé de reproduire ce qui lui avait réussi lors de la campagne présidentielle en 2017 : s’immerger au plus près des Français. Le président de la République veut multiplier les déplacements de deux jours dans les régions, comme il s’y était engagé au début de son quinquennat mais sans y parvenir jusqu’ici compte tenu de son agenda international.

Mercredi 14 mars, le chef de l’Etat s’est ainsi rendu à Tours, où il a visité un centre de formation des Compagnons du devoir, pour y vanter sa réforme de l’apprentissage, avant de participer à un « dîner républicain » avec des élus locaux et de passer la nuit à la préfecture. Jeudi matin, il devait poursuivre son « immersion », selon le terme utilisé par l’Elysée, par une visite de l’école primaire de la commune de Rilly-sur-Vienne, (Indre-et-Loire) puis il devait se rendre au lycée de Loches, où était programmé un déjeuner à la cantine de l’établissement avec des enseignants et des élèves.

« Quand on vient chez les gens pour leur expliquer quelque chose, il est bien de montrer qu’on ne passe pas en coup de vent », explique Bruno Roger-Petit, le porte-parole de l’Elysée, pour justifier ces déplacements de deux jours.

A la demande du chef de l’Etat, le programme des visites a été aussi allégé, afin de passer plus de temps au même endroit sans multiplier les rencontres dans une même journée, comme c’était la pratique jusqu’ici. « Les gens disent beaucoup plus de choses au bout de quatre heures qu’au bout d’une heure », justifie-t-on à l’Elysée.

« C’est une vraie éponge »

A écouter ses proches, ces moments sont en effet un moyen pour M. Macron de « capter l’air du pays » et d’éviter le syndrome de la tour d’ivoire, qui guette tous les présidents de la République.

« Emmanuel Macron, c’est un formidable capteur, passer une nuit en préfecture, déambuler dans la rue, aller au contact des gens lui permet de sentir les choses », assure Bruno Roger-Petit.

« C’est une vraie éponge. Il entend tout ce qu’on lui dit et ça se transforme ensuite en concepts et en décisions », abonde Jacqueline Gourault, la ministre auprès du ministre de l’intérieur, qui accompagnait le chef de l’Etat lors de sa première journée en Touraine, tout comme Muriel Pénicaud, sa collègue du travail.

Ça tombe bien, Emmanuel Macron n’a pas été épargné par les interpellations lors de son déplacement. A plusieurs reprises, il a ainsi été apostrophé par des retraités, qui lui reprochent la hausse de la CSG intervenue au 1er janvier. « Vous êtes partis à la retraite au même âge que vos parents avec une espérance de vie de dix à quinze ans de plus. Je suis obligé d’en tenir compte », a tenté d’expliquer le président, alors qu’un mouvement national de protestation des retraités était attendu jeudi. « Si je ne fais pas cet effort pour ceux qui travaillent, il n’y aura personne pour payer vos retraites », a-t-il ajouté.

« Il faut aller très vite et très fort »

Interrogé sur la vitesse avec laquelle il met en œuvre ses réformes, considérée comme trop rapide par ses adversaires mais aussi par certains élus de sa majorité, M. Macron s’est également refusé à temporiser. « Voyez ce paradoxe, on dit que les réformes vont trop vite mais les Français voudraient que les choses aillent plus vite ! », a-t-il déclaré, estimant au contraire qu’« il faut aller très vite et très fort dans les réformes qu’on met en œuvre, car c’est la condition pour que nos concitoyens en voient les effets ». Selon Matignon, le gouvernement a prévu de présenter sept projets de loi en conseil des ministres lors des sept prochaines semaines.

Persuadé que ce format de déplacement de deux jours en France est le bon, l’entourage du chef de l’Etat en a d’ores et déjà prévu deux autres au cours du prochain mois, sans parler des visites effectuées sur une seule journée.

« Il y a beaucoup de gens qui ne veulent pas que ça change, donc j’explique, je rencontre tous ceux que je peux [car] on se nourrit du terrain », a justifié M. Macron tout en assurant qu’il ne cherche pas à faire l’unanimité. « Je ne peux pas plaire à tout le monde », a-t-il concédé.

Signe que son image lui importe néanmoins, le président de la République était accompagné à Tours par la photographe américaine Annie Leibovitz, à qui il a donné toute liberté pour le suivre à l’Elysée et lors de ce déplacement. Selon son entourage, les photos de la célèbre portraitiste doivent servir à illustrer un portrait de M. Macron que le magazine Vanity Fair publiera à l’occasion de sa visite aux Etats-Unis, prévue du 23 au 25 avril. Un autre type d’immersion très loin de l’Indre-et-Loire.