• Claire Morel
    Galerie Martine Aboucaya

Claire Morel dessine des livres. Non qu’elle soit graphiste pour l’édition, mais parce que les livres sont son sujet. Avec une ­impeccable minutie, à la mine de plomb et aux crayons de couleur, elle reproduit à leur format, mais sur une feuille plus grande, les couvertures des ouvrages qui lui importent. ­Typographie, illustrations, sigles des collections, tout est imité parfaitement, si ce n’est que les noirs sont moins noirs, les bleus moins bleus que s’ils étaient imprimés. Aussi l’œil se ­détrompe-t-il vite. Mais l’essentiel est moins cette dextérité que le processus mental. Il y a le choix des livres et des auteurs : Artaud, Borges, Perec, Daumal, Blanchot, Bataille et quelques philosophes aussi, Sartre, Wittgenstein, Foucault, Guattari. Bibliothèque substantielle, qui aide à vivre. Il y a cette affirmation ensuite qu’être artiste, ce n’est pas seulement ­produire et se montrer, mais d’abord lire et s’interroger. Il y a la lenteur enfin. Il faut du temps pour parachever chaque dessin et du temps pour circuler de l’un à l’autre dans la galerie. A l’instantanéité futile et à la précipitation amnésique, Claire Morel oppose la défense de ses feuilles légères, juste fixées au mur. Un barrage contre la bêtise pour plagier Duras, une autre de ses lectures. Philippe Dagen

« Apologie du plagiat », de Claire Morel. Galerie Martine Aboucaya, 5, rue Sainte-Anastase, Paris 3e. Tél. : 01-42-76-92-75. Du mardi au samedi de 12 heures à 19 heures. Jusqu’au 21 avril.

  • Diego Bianchi, Santiago de Paoli, Anna Hulačová, João Queiroz, Rudolf Samohejl
    Galerie Jocelyn Wolff

« Still Life with a Butterfly » (détail, 2016), d’Anna Hulačová. / COURTESY OF GALERIE JOCELYN WOLFF

C’est une ville abandonnée qui s’offre ici au regard. Au sol, des octogones de béton se souviennent d’hier. Ils sont jonchés de fragments de céramique et de boussole, scie et tuyaux, cactus, pneu… Une foule de petits objets, enchâssés dans la matière par le Tchèque Rudolf Samohejl. Cette sculpture donne le « la » de « Dormir au soleil », une frappante exposition collective qui relève plus du sommeil que de la lumière. Une toile d’herbes folles de João Queiroz semble l’un des rares fragments de nature à être préservé dans cette fin d’un monde. Quant à l’être étrange façonné par Anna Hulačová, il semble au-delà de l’animal, et au-delà de l’humain. Pour parfaire le désastre, une parabole de Diego Bianchi : un ballon de basket dégonflé flotte dans un aquarium jonché de débris, sacs plastique et canettes. Allusion ironique à l’une des premières œuvres de Jeff Koons, elle vient parfaire le sentiment de naufrage. Emmanuelle Lequeux

« Dormir au soleil ». Galerie Jocelyn Wolff, 78, rue Julien-Lacroix, Paris 20e. Tél. : 01-42-03-05-65. Du mardi au samedi de 11 heures à 19 heures. Jusqu’au 21 avril.