Civils et rebelles évacués de la Ghouta orientale arrivent dans la ville de Qalaat al-Madiq, a près de 300 kilomètres au Nord de Damas, mardi 26 mars. / ABDULMONAM EASSA / AFP

Le régime de Bachar Al-Assad, soutenu militairement par Moscou, est en passe de reconquérir l’intégralité des territoires rebelles à la périphérie de Damas, dans la Ghouta orientale. Le dernier fief rebelle aux portes de la capitale syrienne continue de se vider de ses combattants après que deux groupes islamistes ont accepté en fin de semaine dernière l’accord d’évacuation imposé par la Russie. Les évacuations se poursuivaient mardi 27 mars, sous le parrainage de la Russie.

Pour la seule nuit de lundi à mardi, 6 749 personnes, dont un quart de combattants, ont quitté la poche sud de la Ghouta, tenue par la faction islamiste Faylaq Al-Rahmane. Il s’agit du convoi le plus important en effectif à quitter à ce jour la Ghouta. Depuis le 22 mars, plus de 17 000 personnes — des combattants accompagnés de leurs familles, mais aussi d’autres civils — ont pris la direction du Nord-Ouest syrien pour s’installer dans des territoires rebelles. Faylaq Al-Rahmane a assuré qu’au total, quelque 30 000 personnes devraient être évacuées.

Chaque jour, le même processus se répète : des combattants privés de la plupart de leur armement, mais aussi des civils, chargés de valises bourrées d’affaires, se rassemblent au milieu d’un paysage de ruines, en attendant que se remplissent les bus. Après de longues heures d’attente, des inspections et des fouilles minutieuses sous la supervision de soldats russes, le convoi peut enfin s’ébranler, des dizaines de bus quittant la périphérie de Damas pour un périple épuisant d’une douzaine d’heures.

Douloureux accords d’évacuation

Après les salafistes d’Ahrar Al-Cham, mercredi 21 mars, les combattants de Faylaq Al-Rahmane, une faction islamiste modérée, ont fini par signer, vendredi, l’accord d’évacuation imposé par la Russie. Mais le doute subsiste quant au sort de la troisième et dernière poche rebelle : celle de Douma, la plus grande ville encore tenue par des insurgés de Jaich Al-Islam, où, selon des statistiques locales, quelque 200 000 civils sont installés, après l’afflux de nombreux déplacés.

Des négociations sont toujours en cours entre Jaich Al-Islam et la Russie, mais les deux parties se sont donné plusieurs jours de réflexion sur les termes d’un accord « préliminaire » qui pourrait avoir été trouvé. En échange du désarmement des rebelles et du déploiement de la police militaire russe, la zone verrait le retour des institutions du régime et des services de base (eau, électricité), sans toutefois que l’armée syrienne y pénètre, selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH). Mais d’après le directeur de l’Observatoire, Rami Abdel Rahmane, les discussions sont retardées par des divergences au sein des rebelles et des « tentatives de sabotage par le camp le plus radical ».

110 000 civils en exil

Appuyé par son allié russe, le pouvoir de Damas multiplie les victoires face aux rebelles et aux djihadistes, jusqu’à reconquérir plus de la moitié du pays. En début d’année, il avait fait de la Ghouta orientale sa priorité, alors que les rebelles de ce secteur, assiégés depuis 2013, tiraient obus et roquettes meurtriers sur la capitale.

Rebelles et civils s’apprêtent à évacuer la Ghouta orientale, près de Damas, lundi 25 mars. / ABDULMONAM EASSA / AFP

Face à la progression des forces du régime, quelque 110 000 civils ont déjà fui les territoires rebelles dans la Ghouta, selon les médias étatiques. Ils n’ont d’autre choix que de rejoindre les secteurs tenus par le gouvernement, en dépit de la crainte de représailles pour certains. Ils abandonnent derrière eux des localités en ruine, où des immeubles éventrés s’alignent le long de rues jonchées de décombres. En prenant le contrôle de nouvelles localités, les forces du régime ont arrêté ces derniers jours une quarantaine de personnes, selon l’OSDH.

Le conflit qui ravage la Syrie depuis 2011 a fait plus de 350 000 morts et s’est transformé en guerre complexe, impliquant de multiples belligérants. Les provinces d’Idleb (Nord-Ouest) et de Deraa (Sud), où rebelles et djihadistes sont très présents, échappent encore très largement au pouvoir d’Assad, de même que le Nord-Est, dominé par les Kurdes.

Les forces en présence en Syrie au 15 mars 2018. / Infographie « Le Monde »